Je vais mentir et dire que tout va bien, donner le meilleur. Je ferais sourire tout le monde, je les aimerais de tout mon cœur, et tant pis si je sombre, si je me noie dans mon malheur.
Crie mon nom quand je brille, je chanterais le tien. Quand je pleure dans le noir, viens prendre ma main. Je peux toujours sourire, mais j'ai besoin de quelqu'un.
J'ai les entrailles qui se tordent, ça fait mal. C'est là que j'entasse tous mes pêchés, alors c'est normal, mais je pense que désormais le pardon est mon inaccessible Graal.
Histoire;
Elle était née en France, dans un hôpital de la ville de Bordeaux, ce petit bébé à qui ses parents donnèrent le prénom de Mélusine. C'était un beau bébé au poids tout à fait respectable, né sans la moindre complication et qui put de la maternité au bout de six jours pour aller rejoindre son foyer. Elle était l'heureuse enfant d'un restaurateur de talent et d'une danseuse proche de la retraite, un couple devenu parents tard pour avoir privilégié leur carrière avant tout. Il avait grandit heureux ce bébé, dans cette belle maison. Il n'a manqué de rien, ni d'éducation, ni d'amour.
Mélusine avait, comme beaucoup de petite fille, toujours admiré sa maman. Elle était la plus belle et la plus gentille à ses yeux, et rien n'aurait put remettre ses certitudes en doute. Pas même les remarques qu'elle pouvait parfois entendre et qu'elle ne comprenait pas tout à fait, disant que sa mère était un peu âgée pour élever un enfant. Elle regardait sa mère avec des étoiles dans les yeux du haut de ses quatre petites années. Et il y avait un moment en particulier où sa mère était encore plus belle que d'habitude. C'était quand elle dansait. La petite fille se sentait capable de l'observer pendant des heures alors qu'elle exécutait les mouvements des plus grands classiques du classique. Et à force de l'observer, l'envie de faire comme elle a grandit peu à peu dans la petite fille. Alors un jour alors qu'elle avait cinq ans, Mélusine rassembla tout son courage.
Elle demanda à sa mère si elle pouvait apprendre à danser elle aussi. La femme en fut à la fois étonnée et ravie. Elle l’interrogea sur les raisons qui poussaient la petite fille à vouloir cela. Alors Mélusine lui expliqua. Elle voulait pouvoir danser comme sa mère, et être aussi belle qu’elle quand elle dansait. Elle voulait simplement lui ressembler. On l’avertit que ce serait dur, que cela demandait beaucoup beaucoup de travail et que ce serait difficile.
Oui, la petite fille le savait. Ou du moins l’avait-elle comprit en regardant sa mère s’entraîner encore et encore, pendant de longs moments. Mais elle voulait vraiment apprendre à danser comme elle et s’entraîner dur ne lui faisait pas peur. Alors ses parents acceptèrent et l’inscrivirent à un cours de danse classique. Ce fut compliqué bien sûr. C’était une discipline qui demandait beaucoup de rigueur et d’application, et les pas n’étaient pas faciles à maîtriser. Il fallait toujours faire et refaire la même chose jusqu’à ce que ce soit parfait.
Mais malgré cela, Mélusine s’amusait. Ca lui plaisait énormément, et plus encore cela lui permettait de danser un peu avec sa mère. Ce n’était que des choses extrêmement simples et maladroites au possible, mais elle adorait ça. Sans compte que la femme ne refusait pas de l’aider à apprendre encore à la maison. Au contraire, elle était ravie de pouvoir partager cette passion avec sa fille. Tout allait bien pour elle, tout était parfait dans sa vie. Et cela dura un temps. Un temps seulement.
La première fois que son monde s’écroula, Mélusine n’avait que sept ans. Aux yeux du monde, ce fut un acte devenu anodin à force d’être répété. Elle avait vu les choses se faire peu à peu, entre les absences et les disputes, mais elle avait naïvement pensé que ça s’arrangerait. Ca s’arrangerait toujours non ? Pourtant non, pas cette fois. Et ce jour-là elle vit sa famille voler en éclat. Le contrat de divorce fut signer dans la cuisine, sous ses yeux, mettant ainsi fin à plus de quinze années de mariage et d’amour. Toutes les choses furent partagées, ainsi qu’elle-même. Ou plutôt sa garde qui revint à sa mère.
Elle alla habiter dans un appartement avec elle, provoquant un changement d’environnement qui la perturba un temps. Elle revoyait son père bien sûr. Tous les weekends. Mais ce n’était pas assez pour elle qui avant le voyait tout le temps, tous les jours. C’était encore vague pour elle qui était encore jeune, à peine en primaire, mais elle sentait que peu à peu ils s’éloignaient. La première fois que ça lui sauta au visage fut quand elle rencontra la copine de son père. Elle ne l’accepta pas d’abord. Elle ne comprenait pas comment son père pouvait aimer une autre femme que sa mère. Ce fut long et cela nécessita de nombreuses explications pour qu’elle comprenne exactement les choses et les acceptent.
La petite fille avait dix ans lorsque son monde changea radicalement. Alors que son père refaisait sa vie avec une autre femme et d’autres enfants, alors qu’elle ne le voyait plus autant qu’avant, sa mère décida de déménager. Cela ne lui aurait posé aucun problème, si elles n’étaient pas passées d’un côté de l’Atlantique à un autre. Mélusine allait suivre sa mère aux Etats-Unis. Cette nouvelle lui fit peur. La peur d’arriver dans un endroit qu’elle ne connaissait absolument pas, de changer de pays. La peur de ne pas réussir à se faire comprendre là-bas, d’être perdue, elle qui ne parlait que quelques mots d’anglais. La peur de ne jamais revenir en France après ça, de ne plus voir son père ni ses grands-parents, sa famille.
Ses craintes furent rassurées une à une, ne laissant que l’excitation du voyage dans son cœur. Elle avait de l’appréhension bien sûr, alors qu’elle regardait par le hublot de l’avion qui l’emmenait dans ce nouveau pays, mais c’était un stress normal. Un stress comme celui qui la prenait au trip au moment de monter sur scène pour danser devant un public. Et ce stress-là, elle le connaissait et savait le gérer.
Finalement, elle arriva à New York. C’était différent de tout ce qu’elle connaissait et elle mit un temps à s’habituer. Elle s’installa avec sa mère dans un appartement de la banlieue alors que celle-ci s’était trouvé un travail en tant que professeur de danse. Un professeur dont Mélusine suivait bien évidemment les cours. Sa passion était toujours là, plus forte que jamais même. Ce qui était au départ une sorte de jeu pour ressembler à sa mère était devenu quelque chose de plus sérieux. Bien plus qu’un jeu, quelque chose comme une vocation. Plus pour sa mère mais bien pour elle-même.
Il lui fallut plusieurs mois et des cours intensifs de langue avant de réussir à bien s’intégrer au pays et à la ville. Le plus dur pour elle fut sans doute les cours. Le système scolaire était bien différent de celui de la France, sans parler de la langue que, si elle comprenait assez bien, elle était loin de maîtriser à la perfection. Mais elle pouvait compter sur les encouragements de sa famille, qu’elle recevait par internet ou le téléphone. Et puis il y avait sa mère. Sa mère qui était toujours là pour la pousser en avant, pour l’encourager. Sa mère qui l’encourageait dans l’apprentissage de la langue et des habitudes états-uniennes. Sa mère qui l’entraînait plus durement que toute autre pour qu’elle atteigne un niveau professionnel. Sa mère qui la poussait vers de nouvelle expérience comme le chant.
Mélusine aimait chanter. Elle chantait faux, ou en tout cas pas très juste, mais ce n’était pas quelque chose à laquelle elle pensait quand elle s’enflammait sur la radio de la voiture. Elle avait ces goûts relativement douteux d’adolescente au cœur tendre à peine sortie de l’enfance, et sa mère avait finit par lui proposé d’apprendre réellement à chanter. Soit elle chantonnait correctement ses chansons insupportables, soit elle se taisait définitivement. Tel est l’ultimatum qui lui avait été posé.
La jeune fille n'avait pas vraiment réfléchit longtemps. Même si entre l'école normal, les cours de danse et les cours de langue qui la suivaient toujours, ses semaines étaient chargées mais elle était curieuse. Alors elle prit des cours supplémentaires. C'était compliqué pour elle d'avoir un emploi du temps aussi chargé, c'était fatiguant mais sa passion et son énergie lui permettait de tenir. Sans compter que sa mère était là, avec elle. Elle prenait grand soin d'elle, peut-être même trop au regard de la façon dont elle contrôlait chaque petite chose, mais Mélusine ne voyait pas ça.
Elle n'était pas à New York depuis quatre ans lorsque la jeune adolescente dû préparer ses bagages pour déménager. Seule cette fois. Et ceci à cause d'une simple sucette. Ça avait l'air bien anodin, mais son régime alimentaire était extrêmement surveiller par sa mère et les sucreries étaient sans nul doute proscrit. Mais il y avait cette sucette. Cette sucette surgit du néant après qu'elle y eut pensé. Et ça se reproduit plusieurs fois avant qu'elle n'accepte l'évidence. Elle avait un pouvoir étrange et ce fut pour cette raison qu'elle dut déménager.
Mélusine débarqua dans la ville d'Astrophel à quatorze ans avec ses bagages, sa place à l'Académie, ses passions et les recommandations de sa mère. A nouveau c'était un dépaysement total, mais seule l'excitation était là. Elle resta impressionnée par les combats qui explosaient entre deux tours de verre, et assez excité bien qu'elle sache qu'il y avait peu de chance pour elle les rejoigne un jour.
Elle s'intégra sans trop de problèmes, en poursuivant ses passions bien qu'elle laissa la danse classique de côté, un peu, pour s'intéresser à d'autres danses. Elle s'amusait follement dans cette école absolument pas comme les autres, avec son pouvoir un peu étrange et passablement inutile dont elle profitait sans honte. Sa mère le lui avait interdit bien sûr, disant que c'était mauvais pour elle, pour sa ligne et par extension pour son avenir dans la danse. Mais sa mère n'était pas là, l'adolescente vivait seule, alors elle bravait les interdits. Petit à petit. Un par un.
On appelait ça la jeunesse. On appelait ça l'adolescence, la découverte de la vie et l'émancipation. On disait qu'il fallait en profiter et Mélusine en profita. Elle profita des sorties en amis, elle profita des fêtes endiablées, elle profita des premiers amours et des premières grandes déceptions, elle profita des nuits blanches sous les néons et des verres d'alcool. Il y avait les bonnes choses, les mauvaises choses et les défis stupides qu'une fierté ridicule poussait à accepter. Elle avait quinze ans.
Elle avait quinze ans et tout n'allait pas bien. Mais elle ne s'en rendait pas compte. Il fallut une série d’événements pour qu'elle le comprenne. Il fallut d'abord qu'elle frôlât la mort dans un éboulement et fut sauvé par un héro du nom de Ash. Il fallut ensuite que cet homme se rendit compte, lui, qu'elle allait mal, ou en tout cas pas très bien. Il fallut qu'il décida de se mêler de sa vie pour l'aider à aller mieux et qu'il la harcela pour qu'elle s'en rende compte. Pour qu'elle comprenne que la pression que sa mère lui mettait pour la danse l'écrasait. Pour qu'elle comprenne qu'elle ingurgitait trop de boissons alcoolisées pour son âge. Et parce qu'il était la seule personne à en avoir prit conscience, ce fut à lui qu'elle parla. De ce qu'elle avait vécue et de ce qu'elle vivait.
Elle lui parla aussi de ses rêves et de ses ambitions. Pouvoir peut-être intégrer un sponsor malgré son pouvoir très peu utile. Pouvoir danser à un niveau professionnel. En fait son métier même. Y mêler aussi le chant pourquoi pas. Avoir une famille, plus tard. Vaincre sa peur de l'engagement dû au divorce de ses parents et se marier. Avoir des enfants. Vivre une vie belle et heureuse, très simplement. Et une de ces choses arriva très rapidement.
Ce fut une surprise. Une mauvaise surprise pour elle qui n'avait que seize ans. Elle tomba enceinte d'un garçon dont elle ne se souvenait ni du visage ni du nom. La peur qu'elle ressentit ce jour-là atteignit facilement celle qu'elle avait ressentit en voyant sa mort se rapprocher. Elle était terrifiée. Elle était trop jeune et trop seule. Elle n'avait aucune idée de ce qu'elle devait faire et la première chose qui lui vint à l'esprit fut de se saisir de son téléphone pour appeler sa mère. Elle avait besoin de conseils et plus que tout, elle avait besoin de réconfort.
Mélusine pleurait au téléphone quand la voix froide de sa mère lui ordonna d'avorter. De se débarrasser de cette chose qui allait entraver sa future carrière de danseuse. Elle fut sommer de prendre un rendez-vous le plus tôt possible pour régler ce problème et de prendre bien soin que ça ne se reproduise plus. L'adolescente obéit. Parce qu'elle avait peur. Parce qu'elle ne savait pas quoi faire d'autre. Parce qu'elle ne voyait pas d'autre solution. Parce que sa mère était sa mère, qu'elle devait forcément avoir raison. Alors elle obéit. Elle se rendit dans une clinique et avorta, sans en rien dire à personne d'autre que sa mère. En gardant ce secret pour elle.
Et quand ce fut fait, ce fut comme se prendre une douche froide. Elle réalisa véritablement tout ce qui lui était arrivé en quelques heures. Tout ce qu'elle avait fait. Et elle regretta immédiatement. Elle se trouva monstrueuse et se détesta. Elle aurait put parler. Elle aurait put crier. Elle aurait put se mettre en colère. Mais elle n'y parvint pas. Elle n'eut que la force d'amasser différentes bouteilles d'alcool et se noyer dedans jusqu'à en vomir ses tripes. Elle était mal et ne réussit pas à remonter la pente.
Elle garda le silence sur ce qui lui arrivait alors que la bouteille devenait sa meilleure amie. Elle en abusait. Elle trichait pour obtenir l'alcool, en mentant sur son âge ou en passant par des intermédiaires. Elle se moquait du moyen. Elle avait juste besoin d'être stone et n'avait pas envie de s'approcher de la drogue. Alors elle buvait. C'était tout ce qu'elle avait trouvé pour se soulager, quitte à s'en rendre malade. Elle mit du temps avant de réussir parfaitement à faire comme si tout allait bien, à donner l'illusion, à mentir. Elle eut besoin de travailler sur elle-même pour retourner à chacun de ses cours, pour sourire sans que ça ne paraisse forcé et à reprendre goût pour la danse qui lui avait coûté ce bébé.
Et elle dansait, beaucoup, elle chantait, un peu, elle étudiait, parfois, et elle buvait, trop. Ainsi était rythmé sa vie, entre quelques heures de sommeil volé sur un banc ou dans un lit inconnu. Ces lits, il lui en avait fallu du temps aussi, pour y retourner. Vaincre la peur que cela recommence, puis devenir presque obsédée par la contraception. Cela s'était calmé aussi avec le temps. Ça se calmait toujours avec le temps. Mais peu importe à quel point elle aimait le sexe, l'absence d'une capote était toujours prohibée. Et elle dansait encore. Plus de danse classique, ou beaucoup moins. Elle ne voulait plus être danseuse étoile. Sa mère avait hurlé. Elle avait enduré avant de répliquer qu'il s'agissait de sa vie. Les appels s'étaient espacés.
Oui, c'était sa vie. La sienne, qu'elle foutait en l'air si elle en avait envie. Elle avait tué un bébé, elle pouvait bien foutre sa vie en l'air non ? Elle dansait le moderne, elle chantait le rock, elle tanguait le hip-hop, elle hurlait le blues. Rien n'avait de sens, tout se mélangeait et les jours passaient. Elle n'avait pas dit à Ash, au sujet de l'enfant. Personne ne savait, à part celle qui l'avait poussé au meurtre sans état d'âme. C'était un secret qu'elle gardait, et qu'elle laissait pourrir en elle.
Elle allait à des auditions, souvent. Auditions de danse ou de chant, histoire de se trouver un travail. Elle échouait souvent, réussissait parfois pour un petit boulot qui l'occupait quelques mois, puis repartait. Il arrivait qu'elle débarque à ces auditions dans un état d'ébriété plus ou moins avancée. Ça ne l'avait jamais vraiment dérangé pour danser bourrée, c'était simplement un peu moins ordonné, mais les jurées étaient chatouilleux. Et trop pédant de son point de vue. Puis un jour, après l'une de ses auditions dont on l'avait chassé pour son comportement, elle avait trouvé une blondinette sur son palier. Une jolie blondinette tout sourire, qui lui avait proposé du taff, juste comme ça.
Elle avait été tenté de dire non. Elle avait dit oui. La raison lui échappait parfois. Mais la blondinette avait aimé sa façon de dansé, même alcoolisée. Elle avait voulu la voir danser quand elle ne l'était pas. Alors Mélusine lui avait montré. Et quelques heures plus tard, elle avait un contrat. Pas les habituels petits contrats qu'elle signait d'habitude. Non non, un gros contrat, de ceux qui la ferait vivre facilement quelques années avant qu'elle n'est besoin d'en chercher un autre. Elle avait hésité à l'annoncer à sa mère. Une carrière d'idole, ce n'était pas vraiment ce qui avait été attendu d'elle. Elle lui avait laissé un message, plus tard, avec la date du premier concert.