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This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo
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July L. Nori
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MessageSujet: This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo   This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo EmptyDim 4 Sep 2016 - 0:14




Feat Romeo R. Eastwood
This life to be saved, aftershocks of the hatred
Saleté de soirée, saleté de mec qui a profité d’un instant où j’avais le dos tourné pour emmener Lyria à danser. Saleté de canapé où je me retrouve toute seule, regardant en grognant le « couple ». D’accord d’accord, elle a bien le droit de s’amuser, mais… Ça me plait pas spécialement, enfin peut être que c’est juste l’ennui la qui me dérange plus qu’autre chose. Parce qu’il faut l’avouer, c’est pénible comme situation et que je n’aime juste pas comment la fête se déroule.

Je soupire, fixant le verre entre mes mains encore rempli. Parce que je n’ose pas y toucher, vu son contenu. De la vodka pomme…. Je crois que je n’aurais pas dû dire oui quand on m’en a proposé, et encore moins laisser le type remplir le verre avec une bonne dose d’alcool. Je crois surtout qu’en fait, j’aurais dû l’envoyer balader quand il m’a approché, complétement bourré. Car visiblement, il ne savait même pas à qui il s’adressait… Et moi j’ai répondu comme une idiote…. Je crains, des fois.

Sauf que maintenant le type est parti parler à d’autres, à aller les bourrer ?, et que je suis toute seule dans mon coin, un verre de vodka pomme dans les mains que je fixe comme si c’était une chose dangereuse. En fait, c’est surtout juste la première fois que je touche à l’alcool, et que je ne sais pas du tout si c’est une bonne idée… Mais ce n’est pas en le fixant que je ferais quelque chose de ma soirée, alors je m’y décide. Doucement, parce que le goût me parait pas spécialement plaisant au début. Faut dire qu’il n’y est pas allé doucement le mec, sur la vodka. Quelques gorgées bues doucement, puis il me faut quelques minutes après un élan de courage pour que j’en termine avec ce maudit  verre.

Bien que maintenant que je regarde mon verre vide, je me sens juste… Conne. En plus de ça, il faut peu de temps pour que je sente l’effet de l’alcool, qui me fais tourner de façon désagréable la tête. En traduction? Je suis nulle, et j’ai juste envie de me frapper la tête. Ceci dit, j’ai surtout l’envie de prendre l’air histoire de me sentir mieux, car là j’ai la tête qui tourne, et la musique, l’odeur de tabac, tout ça m’est insupportable en cet instant.

Un soupir, le temps que je parvienne à décoller du fauteuil, et je jette un coup d’œil vers Lyria en lui faisant signe que je reviens. Il ne faut que quelques secondes pour que je sente le petit vent présent, en pleine nuit d’été, plus agréable en vérité que si on était en plein hiver. Alors j’avance, essayant de me défaire de cette tête qui tourne un peu trop à mon goût. Ouais, c’est qu’une sale soirée en fait.

Je regarde partout pour voir si il n’y a rien, mais non personne. Je me contente de quelques pas, essayant d’échapper à ce tournis. Heureusement, j’en suis encore au stade où mes idées sont claires, ne serait-ce qu’un peu. C’est sans faire vraiment attention que j’avance, les yeux rivés vers les lampadaires que je suis. Ceci dit je ne suis pas sûr d’où je vais, mais de toute façon je n’ai pas l’intention de m’éloigner très loin de la maison, juste histoire de me remettre. Enfin, c’est ce que je pensais.

Un soupire qui sort de mes lèvres, baissant le regard vers mes poches pour me saisir de mon portable avec l’intention juste de regarder l’heure. Mais au lieu de ça, mes yeux se fixent par réflexe sur une forme que je vois, au loin. Sur le coup je ne vois pas très bien, manque de luminosité et trop loin pour que j’y distingue quelque chose comme il faut. Pourtant, ça me perturbe cette forme, qui finalement me pousse à avancer un peu en déclenchant mon pouvoir pour y voir plus vite…. Mauvaise idée, quand l’alcool déjà me fais pas bonne effet. Je grimace, essayant de passer outre la désagréable sensation que cela me fais. Et mes yeux se grossissent, à la vision d’un homme à terre.

Il ne me faut à peine quelques secondes pour que mes jambes décident de m’y emmener, quelques secondes pour que je me trouve à côté de l’homme que je ne manque pas de reconnaitre tout aussi rapidement. Mais plus que le fait qu’il est était présent à la fête, c’est plus les blessures visibles qui me font tilter, paniquer d’un coup.

- Hé ?! Tout va bien ?!

Evidemment que non, qu’il n’allait pas bien. Mais je voulais surtout être sûr qu’il m’entende, qu’il soit vivant. Je me suis accroupi en même temps, lui prenant le bras pour vérifier son pouls… Encore en vie, je me suis dépêché de saisir mon portable pour appeler les urgences. Bien que mon regard ne se décolle pas de lui, que je me suis senti rougir…. Me rendant hésitante d’un coup, mais j’ai approché ma main disponible pour me saisir de la sienne fermement.

- Ne t’en fais pas, il y a quelqu’un ici, je vais t’aider ! Je vais appeler l’hôpital, d’accord ? Si tu m’entends, serre ma main s’il te plait !

Bien que je me retienne de trembler, je compose le numéro des urgences et là aussi il ne faut que quelques secondes, pour que j’entende la voix d’une femme à l’autre bout.

- Madame, je viens de trouver un homme inconscient ! Il… Il est blessé au visage, il respire encore mais… Il ne bouge plus…. D’autres blessures ?

Mon regard se déplace tout le long du corps, et je me sens mal d’un coup. Enfin pas mal, juste… Juste dérangée. Sauf que ce n’était pas le moment, alors c’est avec le plus grand courage que je me retrouve à soulever le haut.

-…. Il a reçu des coups partout sur le corps.

Je fini par lâcher, donnant l’adresse de la rue avant de raccrocher. Je me maudis sur le coup, de ne pas être venue en voiture, de paniquer si bêtement devant un corps à moitié vivant. Je ne lâche pas cette main, la serrant un peu plus encore.

- Ouvre les yeux….

Et je peux qu’espérer une réponse, en me mordant la lèvre en attendant que l’urgence arrive.
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Romeo R. Eastwood
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MessageSujet: Re: This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo   This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo EmptyDim 18 Sep 2016 - 22:03

Tu pourrais tout aussi bien crever, ici, comme ça, seul à la sortie d’une rave. Ce serait tellement con — ce serait tellement toi.
Mais c’est sans compter sur le destin, qui se fout toujours autant de ta gueule, dans le fond.


Ça commence par un bourdonnement ; il s’était tu pourtant, il n’y avait plus rien. Seulement le silence, si profond que tu ne le discernais plus. L’obscurité, aussi, qui se fait un peu plus claire, un peu plus grisonnante plutôt que d’abysses. Et c’est ensuite la douleur, ténue, simple souvenir qui se ramène à toi par vagues, chaque nouvelle plus forte que celle d’avant, jusqu’à te faire imperceptiblement serrer les dents. T’es toujours loin, les yeux clos, et ce qui gronde à tes tympans t’empêche de comprendre ce qui vient d’ailleurs, ce qui vient d’autour. C’est toi, toi, toi et ta conscience, bouffée d’opiacée, brumeuse d’éthanol et uniquement centrée sur le mal qui te ronge — ton visage, tes mains, tes côtes. Ça revient doucement, tes sens, et ça commence par le froid qui te fait frissonner, la chaleur qui te fait transpirer, puis chaque épicentre de souffrance devient un peu plus clair. Tu reprends conscience de ton corps sans trop y prêter attention, tu ne penses plus, tu ne réfléchis pas — t’as mal et, putain, t’es vivant. T’aurais sans doute préféré le contraire — t’as même pas le temps d’y songer qu’une nouvelle vague de douleur interrompt le fil rouge de tes pensées, te replonge dans un état semi-comateux qui dérange. T’as envie de gerber — l’idée s’immisce peu à peu, à mesure que tu réalises le goût du sang dans ta bouche, son odeur qui envahit tes narines, le poisseux immonde sur ton visage.

C’est un autre bourdonnement, aussi ; plus vif, plus clair, plus aiguë, plus douloureux. Tu ne comprends pas, tu ne bouges pas — parce que tu t’en es pas capable, parce que tu n’en vois pas non plus l’intérêt.
Et puis, c’est une autre chaleur, sur ton bras, dans ta main ; c’est un frémissement qui t’agite, un frisson qui remonte le long de ta colonne vertébrale. Ce sont les grésillements qui commencent à se dissiper, mais les mots qui ne prennent toujours pas sens ; mais c’est une voix, douce, inquiète, c’est un point d’accroche à la réalité, c’est la lumière, c’est la douleur, et pourtant cette fois-ci, tu n’essaies pas tout à fait d’y échapper. Parce qu’il y a cette sorte de tendresse qui t’interdit de lâcher prise — t’aimerais bien, pourtant —, qui te ramène à ce que t’essaies de fuir d’habitude, ce à quoi t’essaies de t’abandonner ce soir.
C’est aussi le souffle de la rue, la brise de l’allée qui effleure ta peau, les contusions sous tes vêtements, les hématomes que tu devines parce qu’ils rendent ta respiration difficile. C’est cette chaleur qui ne quitte pas ta main, se fait plus présente encore ; c’est une voix qui déchire le silence, qui brise les ténèbres, c’est un éclat désespéré qui rend les crépitements parasites de tes tympans dérisoires. C’est un « Ouvre les yeux... » qui a raison de ta volonté, raison de tes dernières tentatives de te soustraire à la lumière que tu hais tant.

Et tu papillonnes, d’une seule paupière, parce que l’autre refuse de s’ouvrir complètement — essayer t’arracherait des grimaces, si seulement ta lèvre ne te lançait pas tant non plus. Ta vue est trouble ; tâches de blanc et de noir qui se superposent, se fondent l’une dans l’autre, s’unissent puis se défont. C’est une silhouette, que tu ne discernes pas tout de suite ; et puis, les couleurs s’esquissent, ternies par la nuit. Eclat rouge sang. Si tu ne te sentais pas vidé de tes forces, t’aurais sans doute essayé de l’effleurer, cette cascade d’écarlate imprécise. « ... hey ... » T’as la voix éteinte, cassée ; t’as manqué t’étouffer avec ton propre sang. T’essaies de te redresser, tu craches le vermeil au sol, et ce simple effort t’arrache une plainte étouffée ; la douleur entre tes côtes te fusille et te force à te rallonger, le souffle court, le regard perdu en direction du ciel — infinité sibylline.

Tu fermes les yeux, t’inspires pour essayer de dissiper les affres qui te font grincer des dents. Les sons de la rue te parviennent de nouveau, celui du vent dans les arbres, des voitures et des chiens dans le lointain, entrecoupés de parasites semblables à ceux que l’on entendrait sur une chaîne de radio mal captée. Lorsque tu poses de nouveau le regard sur la silhouette au dessus de toi, l’esquisse est un peu moins chaotique. Si tu ne discernes pas les contours précis, la teinte exacte de chaque nuance de couleur, mais tu devines quelques traits de ton visage, le froncement soucieux de ses sourcils, la moue préoccupée de ses lèvres et, par association d’idées — du peu que t’arrives à réfléchir — tu parviens à mettre un début d’identité sur ta… sauveuse ? « ... toi …? t’es… hm, chienne’garde d’Lin… hm, ‘ria ? » C’était un souffle peu audible, une haleine alcoolisée, quelques mots avalés, peu articulés, parce que ta lèvre inférieure te lance un peu trop pour forcer — t’as même pas le courage d’essayer une ébauche de sourire — et qu’t’as pas vraiment les idées claires, pas le courage de réfléchir, d’exprimer une pensée construite — te réveiller, c’était déjà un peu trop demander.

T’es même plus certain de savoir ce qui t’a mis dans cet état, quand, comment, pourquoi. T’as pas le souvenir exact du premier coup, encore moins celui du dernier, tu ne sais plus à quel moment t’as perdu connaissance. T’étais où, avant ? « ... passé quoi ? » Comme si elle savait mieux que toi, la rouquine que t’embarques dans tes emmerdes alors qu’elle ne te connaît ni d’Eve, ni d’Adam.
T’abandonnes ; t’abandonnes l’idée de te souvenir — les black out, t’as l’habitude. Ça te reviendra peut-être, tu ne sais pas, tu t’en fous ; t’es retourné à ta lutte pour ne pas sombrer dans le sommeil. Tes yeux peinent à rester ouverts, tes paupières cherchent à se clore, ton esprit tente de se réfugier hors de portée de la douleur, ton corps suit le mouvement. Et pourtant, tu te bats pour ne pas leur céder, tu te bats pour ne pas l’inquiéter, c’te gosse qui n’a rien demandé. Tu serres doucement sa main dans la tienne, tu plies et déplies les doigts de la libre, celle aux phalanges écorchées ; t’essaies de rester là, de n’pas chavirer.

Parce que t’as le souvenir de sa voix qui te demande d’ouvrir les yeux, t’as le reste de ce fracas de vie à l’esprit, t’as les débris de c’te parcelle de tendresse qui t’dit tiens bon, lâche pas, et ça, ça, t’as pas envie d’y échapper. Parce que ça, ce soir, au delà de la souffrance, de l’alcool et des drogues, envers et contre tout, même si c’est douloureux à en pleurer, douloureux à en crever, ça, ce soir, ça, ça t’donne une raison de continuer, et ça, surtout, putain, c’que ça t’rend vivant.
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July L. Nori
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MessageSujet: Re: This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo   This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo EmptyDim 16 Oct 2016 - 0:21




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This life to be saved, aftershocks of the hatred
J'ai la peur au ventre, en regardant l'homme inconscient. Parce que je ne peux faire qu'attendre les urgences, parce que je peux seulement que parler dans le vide dans l'espoir qu'il m'entende, qu'il réagisse. Et si c'était trop tard, s’il venait à succomber à ses coups avant qu'on puisse faire quoi que ce soit ? S’il mourrait devant moi sans un mot ? Ces idées me font tellement froid dans le dos, bien trop paniquer.

C’est ironique d’ailleurs, quand je suis celle qui d’habitude tue de sang-froid.

Non ce n’est pas le moment d’y penser, pas à moi. Il respire encore, les ambulances ne devront pas tarder à arriver maintenant. Est-ce que c’est suffisant ? Je ne peux pas faire grand-chose au final, si ce n’est que lui tenir la main en l’appelant. Est-ce que c’est utile ? Je ne sais pas, je panique bien trop surement. Je ne sais pas du tout quoi faire vraiment, dans cette situation.

Pourtant il y a un mouvement, un œil qui s’ouvre avec difficulté tandis que l’autre reste fermé, mais au moins cela a le mérite de me rassurer un peu. J’essaye de retenir mes tremblements, aussi de ne pas montrer que j’ai bien trop eu peur. Alors j’attends une autre réaction de sa part, mais c’est juste sa voix, bien trop faible, qui finit par s’échapper du silence.

- ... Hey ...

Il y a ce simple mot qui me rassure un peu plus, qui parvient à calmer mes mains tremblantes. Je le fixe, ne savant que dire la maintenant, laissant le silence tandis qu’il essaye de se mettre assit. Et sans même y réfléchir, j’essaye de l’aider, de le soutenir que je peux en entourant mon bras libre derrière son dos. Sauf qu’il finit par cracher du sang, et je me sens de nouveau mal pour lui d’un coup. Je peux pas faire grand-chose, si ce n’est que lui frotter doucement le dos, ne serait-ce que pour lui montrer que je suis encore là pour le soutenir. Bien que le fait qu’il se rallonge me pousse à retirer ma main de son dos, alors que celle tenant la sienne ne la lâche pas du tout. Et j’ai peur un instant, en le voyant fermer les yeux.

- Ah non, reste avec moi !

Mais ça va, il rouvre rapidement les yeux pour me regarder. L'inquiétude pourtant ne me quitte pas une seconde, malgré la gêne qui me reprend lui aussi à cause de nos regards qui se croisent, c’est déroutant comme pour ce soir je n’aime pas vraiment ça. Et ceux, c’est depuis que je l’ai vu, à la fête.

- ... Toi … ? T’es… hm, chienne’garde d’Lin… hm, ‘ria ?

C’est la surprise qui est visible sur mon visage, en l’écoutant. Donc il hum… La connait ? Enfin oui, je l’ai bien vu l’approcher, mais disons que j’étais plus préoccupée à ce moment-là à le regarder du genre « ne la touche pas » qu’à m’interroger vraiment s’ils se connaissaient. Pourtant, maintenant ça me perturbe, autant que le fait que le fait que durant la fête, mon regard ne le quittait pas pendant un long moment. Que… Le regarder même à la fête me faisait un drôle d’effet, c’est vraiment qu’il est…. Comment dire ça. Oh et puis zut, ce n’est pas le moment de penser à ça !

Son haleine me fait grimacer un peu, mais il y a tellement d’odeurs présent qui sont désagréable. Le sang, l’alcool et le vomi, c’est… Presque écœurant, à ce niveau-là. Mais j’essaye de ne pas y faire attention, je secoue doucement la tête pour confirmer ses dires, même pas capable là de râler un peu pour ce surnom assez stupide à mes yeux. Je ne sais même pas s’il m’a vu en fait, mais qu’importe.

- ... Passé quoi ?

Je le regarde un instant, avant que mes yeux se baissent pour fixer le sol. Pour réfléchir, un court instant à ce que je pourrais répondre. Je reste un moment silencieuse, jusqu’à sentir sa main réagir au contact de la mienne, ses doigts serrant un peu plus l’emprise. Il y a de nouvelles rougeurs sur mon visage à ce moment, et je redresse les yeux vers lui.

- Je t’ai trouvé ici inconscient, mal au point… Tu ne te souviens plus ce qui t’es arrivé ? Je peux juste te dire que vu les blessures, tu as dû te prendre de sacré coup…

Je peux même pas lui répondre vraiment, mais un instant je m’en voudrais presque d’être arrivé si tard. Et je n’ose pas imaginer ce qui serait arrivé, si je n’étais pas venu du tout.

- En tout cas j’ai appelé l’hôpital, ils devraient pas tarder à arriver… Ne bouges pas trop, d’accord ?

C’est un regard de nouveau inquiète que je lui lance, de peur qu’il finisse par s’évanouir. Alors pour essayer de le concentrer sur quelque chose, je frotte la paume de sa main avec un de mes doigts, quand bien même ce simple geste me gêne tout autant que le reste. Mais si c’est pour aider, qu’importe non ?
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MessageSujet: Re: This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo   This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo EmptySam 18 Fév 2017 - 20:58

Parce que ça, ce soir, au delà de la souffrance, de l’alcool et des drogues, envers et contre tout, même si c’est douloureux à en pleurer, douloureux à en crever, ça, ce soir, ça, ça t’donne une raison de continuer, et ça, surtout, putain, c’que ça t’rend vivant.
Ça te donnerait presque envie de te battre, de te donner les moyens d’avancer, une impulsion nouvelle. Ça te donnerait presque envie de ne pas tout lâcher, tout laisser tomber ; tes rêves, tes projets, ton avenir : tout, à commencer par toi-même. Tu ne comprends pas trop, pour ne pas dire pas du tout. C’te gosse, elle te fait un truc, tu sais pas quoi, mais c’est aussi viscéral qu’inéluctable, qu’ineffable. Ça fait mal, et en même temps ça t’rassure, ça brûle, mais putain ce que ça t’fait du bien, ça bouillonne, ça palpite, ça ramène à toi ces quelques sensations que t’avais oubliées, ces choses auxquelles t’avais arrêté de croire — sur lesquelles t’es incapable de mettre le moindre des mots, parce que t’y comprends pas, tu connais pas, tu ne connais plus, tout du moins.
T’avais presque oublié ce que c’était, depuis le temps; la sensation de la vie qui bat et tonne, forte, solide, irrépressible entre tes côtes, au détail près qu’il y en avait bien une encore capable de te faire vibrer jusque là.

« Je t’ai trouvé ici inconscient, mal au point… Tu ne te souviens plus ce qui t’es arrivé ? Je peux juste te dire que vu les blessures, tu as dû te prendre de sacré coup… » Tu frissonnes, tu grimaces, ça te revient, un peu. Peut-être parce que la douleur te dégrise, t’as les idées un peu plus claires — quoique focalisées sur le mal qui te ronge. T’aimerais bien oublier de nouveau, mais t’y peux rien cette fois. T’es cloué au sol, tu peines à respirer franchement, parce que le moindre geste te coûte, la moindre inspiration te brûle. T’as tout qui se mélange : les coups, la descente, les tous premiers signes du manque qui se font sentir, le froid, la peur, aussi, peut-être ; et la haine, c’te haine viscérale qui t’agite et te ferait presque trembler. Tu te souviens d’un visage, d’un nom, et l’idée fuse trop vite pour que tu l’étouffes — il le paiera.
Et puis, ça tombe — comme une bombe, comme une claque. « En tout cas j’ai appelé l’hôpital, ils devraient pas tarder à arriver… Ne bouges pas trop, d’accord ? » T’as eu un hoquet — terrifié. « ... non ... » Ta main se retire de la sienne ; t’essaies de te redresser, t’envoies valser la douleur de tes côtes et tes nausées, la tête qui te tourne pour t’asseoir. T’as le souffle coupé et, parce qu’emplir tes poumons d’air est mission impossible, t’es condamné au silence, pendant ce qui te semble être une éternité.
Enfin, la vague d’affres immondes ne te secoue plus, tu peux desserrer les dents, siffler entre elles. « ... non, on… on m’embarquera pas dans c’t’endroit. Qu’ils aillent… s’faire foutre. »

Ça commence par l’hôpital pour les gens malades,
ça finit dans celui que l’on réserve aux fous.

Tu l’as un peu trop vécu pour vouloir réitérer l’expérience — tu sais quel sort on réserve à ceux qui ont de l’héroïne dans le sang et des blessures aussi récentes que volontaires sur les poignets. T’as pas envie de revoir la ribambelle de psychiatres, d’animateurs de séances de thérapie de groupes, d’autres qui s’occupent des toxicomanes et de leurs histoires personnelles, du pourquoi et des comment. T’as pas la force pour une cure de désintox’, t’as pas le courage pour les murs ternes de l’asile et les regards vides des résidants. T’as pas envie d’en être de nouveau, rendu insensible par les médocs, vague coquille vide à peine capable d’hocher la tête quand on l’interroge.
Et puis, merde, quoi : les cachets qu’on te refilait ne t’ont jamais rendu l’envie de vivre, quand bien même c’était ce que l’on te promettait.
Il est clair : la vie a toujours été plus colorée à l’extérieur qu’entre les quatres murs gris et le plafond fissuré, mais pas suffisamment pour te tenir les yeux ouverts bien longtemps.

T’as le regard fuyant, les ambres portées sur la rue, sur les moustiques qui tournent autour des réverbères ; t’entends presque le grésillement irrégulier qui signifie que l’un ou l’autre ne réchappera pas de cette valse dangereuse. Ils sont un peu téméraires, un peu branques, un peu comme toi en vérité. T’aimes bien jouer les casse-cou, prendre des risques stupides, commettre des imprudences rien que pour sentir l’adrénaline embraser ton corps tout entier, c’est bien pour ça que t’acceptes de conduire des bagnoles lancées à pleine vitesse pour quelques billets, pas vrai ? Tu t’en fous presque, des thunes, ces soirs-là ; mais le souffle court, les frissons le long de l’échine, les frémissements au bout des doigts, quand ils ont encore l’impression de s’agripper au volant comme au dernier raccord à la vie, tout ça, t’aimes tellement. T’es tombé en amour du danger, d’la connerie, des périls et de la fortune, toi qui ne tiens pas à grand chose, tu mises tout ce qui a déjà perdu son importance à tes yeux.
Toi aussi, t’es attiré par la lumière, par la chaleur, mais pas de la même façon : seulement celles qui sont dans ta tête, et que t’allumes à risquer de te foutre en l’air par bien trop de moyens.

« ... pourquoi t’as appelé l’hosto ? C’est… juste deux-trois égratignures. »
Y’a d’la terreur dans ta voix.
Putain, mais tu t’es vu pour dire ça ?
Tu t’es vu, avec ta gueule cassée, ton oeil trop douloureux pour être ouvert, le sang sur ton visage, sur tes fringues, tes mains écorchées et ta peau trop pâle marquée de bleus trop sombres ?
T’as vu ce que t’as mangé, avant de raconter des conneries, ou ça non plus, ça n’a déjà plus d’importance à tes yeux ?
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MessageSujet: Re: This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo   This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo EmptyDim 26 Mar 2017 - 19:27




Feat Romeo R. Eastwood
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Je comprends rien. A cette soirée, à cette situation, à ses blessures. A ma gêne, étrange, à ces battements de cœur un peu trop rapides à l’intérieur de moi. Bon sang, j’ai jamais été la fille insensible aux contacts des gens, mais là il y a une différence entre ça et le fait que ça en devient extrême, non ? Je m'énerve moi même, peut être un peu trop, peut être que j’ai des idées bizarres et vaines aussi, mais je la ressens bien cette chose pas forcément agréable. Piquante, mais étrangement douce à la fois. C’est peut être ces traits à lui, ce besoin de présence, de ma présence, cette douleur dans le regard aussi, cette vie qui a l’air de vouloir se battre maintenant, peut être que c’est juste ça qui m'émeut, plus que je ne le pensais.

- ... Non ...

Ca non plus, je le comprends pas. Et ça doit se voir, à mon regard, à ma bouche qui s’ouvre perplexe tandis qu’il retire sa main, honnêtement j’aurais préféré qu’il ne le fasse pas. Il se tente de se lever, l’abruti qui doit avoir mal vu les blessures, et moi je suis là aussi abrutie que lui à poser ma main maintenant libre sur son dos, appui plutôt inutile. Je pourrais lui crier de pas bouger, l’ordonner tout du moins, mais l’inquiétude concernant son refus doit me rendre un peu trop incapable de faire quoi que ce soit.

- ... Non, on… on m’embarquera pas dans c’t’endroit. Qu’ils aillent… s’faire foutre.

Comme si il y avait le choix. Il a sans doute ses raisons, ses craintes, mais d’entendre ça ça me donne envie de le frapper, s'il ne l’était pas déjà suffisamment. Je soupire, il faut que je le persuade. Mais il se fait plus insistant encore, dans son refus, dans sa bêtise.

- ... Pourquoi t’as appelé l’hosto ? C’est… juste deux-trois égratignures.

- Mais t’es con ou quoi ?

Merde, peut-être un peu trop spontanée comme réponse.

Je lâche un autre soupir, le regard un peu plus désolé. Je devrais pas, vu dans l’état physique qu’il est, mentalement ça doit pas aller très bien non plus… Et voilà que je m’en veux, le regard qui se tourne en osant plus le regarder. C'est bête, je ne parviens pas à me détendre. C'est tout juste si ma colère se dissipe, quand bien même ce n’est plus vraiment contre lui qu’elle est dirigée.

- Écoute…. Tu n’es pas en état, tu es plein de bleus tu le sais ça… ? Faut qu’on te soigne, tu peux pas rester comme ça ! En tout cas je te laisserai pas sans m’être assuré que tu sois soigné.

Non c'est pas ça, je partirais même pas sans l’avoir vu conscient à l'hôpital, je veux pas le laisser tout seul. Ça m’inquiète, un peu trop sans doute. Je lui reprend la main doucement, j’essaye d’être la, encore. Et si je pouvais trouver le moyen de briser le silence pour éviter qu'il se décide à perdre conscience, ça serait parfait.

- En fait mon prénom c'est July

Sérieusement, pourquoi ? Si, parce qu’être appelé chienne de garde c’est pas forcément agréable mine de rien, même si il y a une grosse part de vérité la dedans. Mais je préfère me faire appeler Juillet à limite plutôt que par un animal qui n'est même pas celui que je préfère.

Et l’action ne laisse pas le temps à plus de  présentation, qui serait pas vraiment des plus normal soit dit en passant, que j’entends au loin l’alarme des urgences. Ça me rassure perso, qu’ils arrivent plutôt rapidement. Ça évitera qu’il finisse par fuir, si jamais il en a la force. Même si il essayait, je doute qu'il irait bien loin.

Je vois le véhicule se garer au plus près, des hommes sortir, l’un nous approche pendant que l’autre ouvre les portières arrières, vient aussi en tirant le brancard, avant de le stabiliser et d’approcher. Ils sont souriant tout les deux, n’hésitent pas une seconde à vouloir le soulever. Mais le blond, il se laisse pas faire, pas tout de suite. Je suis là, à les regarder tenter de le convaincre, finalement il a l’air prêt à se laisser faire, plus par obligation que lui cause la douleur que par envie véritable. C’est déjà ça.

Je viens monter à l’arrière, sur la droite, quand le brancard est de nouveau installé, regardant les portières qui se referment, ne lâchant plus mon regard même une fois la vision de dehors absente. J’ose pas trop le regarder, en fait, peur d’avoir même fait concernant son refus, même si il n’y avait pas d’autre choix concernant son état. J’aimerais bien briser le silence, mais je ne suis même pas sur qu’il serait capable de répondre de toute façon. Alors je ne dis rien, je me contente d’attendre que le véhicule s’arrête, qu’on arrive.

Je serais même pas dire combien de temps exactement, même si cela m’a semblé bien court, mais finalement je sens qu’on se stoppe, j’entends les portières avants qui s’ouvrent et se referment, les portes de derrières qui s’ouvrent et je vois le brancard être descendus, de nouveau. Je les suis, un moment, pour me retrouver à l’intérieur du bâtiment. Mais pas plus, on me demande d’attendre dans la salle, alors je viens m’asseoir. Silencieuse, un peu inquiète malgré tout, même si ici il n’y a plus rien à craindre quand finalement, ses jours ne sont pas tellement en danger. Mais malgré tout, c’est énervant de rester ici, à pas savoir, à rien faire.

Pendant deux secondes, je me rends compte que je me suis éloignée un peu trop de la fête, et que je n’ai pas vraiment l’intention d’y revenir. Heureusement que j’ai pas laissé mes affaires la bas, je me saisis de mon portable et envoie rapidement un sms à Lyria, qu’elle arrête de me chercher ou de m’attendre. Puis je le range, j’attends. Le temps me parait longtemps, avant que je vois un des hommes qui nous ont emmené m’approcher.

- Tout va bien, monsieur Eastwood a été soigné, vous pouvez aller le voir!

Eastwood… Sur le coup je doute, mais ça doit bien lui. Alors je suis l’homme, le pas rapide pour ne pas le perdre alors que lui avance un peu trop vite, ou alors c’est juste sa grande taille comparée à la mienne qui fait que les distances se font un peu trop gênantes. Toujours est-il que j’arrive malgré tout à la chambre, accompagné d’une infirmière. J’hésite, peut être que je serais dans trop alors que dans le fond, je suis juste sa sauveuse ? Finalement, qu’importe, je fais un pas, deux, pour me retrouver dans sa vision

- Ça va un peu mieux ?

Je sais pas, il doit toujours avoir mal vu ses blessures, peut être….
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MessageSujet: Re: This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo   This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo EmptyJeu 3 Aoû 2017 - 0:32

« Mais t’es con ou quoi ? »
Silence.
Regard noir.
J’ai vaguement envie de lui gueuler dessus, vaguement envie de cracher à ses pieds, vaguement envie qu’elle dégage et me foute la paix. Même temps, qu’est-ce que je pouvais bien attendre d’autre que la chienne de garde de Lyria ?
« Écoute…. Tu n’es pas en état, tu es plein de bleus tu le sais ça… ? »
J’ricane, et ça fait un peu mal entre mes côtes, ça tiraille aussi ma lèvre, un peu. Mais je m’en fous, je me marre — si tu savais comme la douleur et les dégâts c’est même pas un quart des ravages à l’intérieur.
« Faut qu’on te soigne, tu peux pas rester comme ça ! En tout cas je te laisserai pas sans m’être assuré que tu sois soigné. »
Merci, infirmière Joëlle, tant d’attention, comme c’est touchant.
Je sens de nouveau sa main sur la mienne, et me soustrais à son contact — ne me touche pas.
J’observe les environs, c’est un peu flou, encore — je crois que c’est l’alcool, plus que le reste ; comme la nausée qui monte encore alors que je croyais avoir déjà rendu tout ce que j’avais dans le bide. Ça lance dans mon crâne, je lève ma main libérée jusqu’à ma tempe, et je grimace. Il y a du sang sur mes doigts, putain, j’dois vraiment avoir une sale gueule.

« En fait mon prénom c'est July »
J’réagis pas. Je ne la regarde pas ; j’enterre l’information quelque part, parce qu’elle ne compte pas. Je l’ignore, comme si elle n’existait pas ; je braque mon regard dans le vide, sur un bout de verre abandonné sur le trottoir et qui brille sous le halo de lumière des réverbères.
Beaucoup plus intéressant.

J’veux pas aller à l’hôpital.
Je ne veux pas.
C’est comme ça que ça a commencé, chaque fois — et c’est pour ça que j’me suis barré. Parce qu’il y avait des images dans la tête de mes pères, et je voulais que ça s’arrête, qu’ils n’en aient plus d’autres.
Je ne veux pas aller à l’hôpital.
Parce qu’il y a la drogue dans mon sang
et les blessures sur mes poignets.
Parce qu’il y a Marvel, là-bas, aussi.

Je songe à essayer de me lever et de m’enfuir quand j’entends les sirènes, au loin, sauf qu’au moindre geste mes côtes me lancent, comme un couteau fichu entre deux os qui m’empêche de bouger tout à fait. Alors, j’abdique, je reste cloué au sol, le dos contre le grillage, et j’observe l’ambulance qui se gare à quelques mètres de là, les hommes qui en descendent.
Il s’approchent, tout sourire, parce qu’ils se veulent rassurants, bas les pattes, vous allez vite déchanter. Il me touchent à peine que je les repousse, ils me parlent que je ricane, ils essaient de m’avoir et je me débats de ce qu’il est possible, tant que la douleur est supportable.
Mais je cède, parce qu’elle est vive quand l’effet anesthésiant de ma drogue se dissipe.
J’aurai ma revanche.

Dans le véhicule, j’ai envie de gerber. C’est pire allongé, alors je demande entre mes dents à ce qu’on me laisse m’asseoir. On me soutient d’un côté et j’esquive les regards, je ferme les yeux en tâchant d’oublier la nausée. Quoique ça serait une belle vengeance, de niquer leur belle tenue de travail ; ils m'foutraient p't'être la paix.
Quand je rouvre les paupières, c’est pour regarder le visage de l’ambulancière qui s’affaire déjà à nettoyer mes mains, écorchées sur le bitume. Elle a l’air jeune, mais elle a les traits déjà durcis de ceux qui ont vu les horreurs du monde, et la mort aussi.
Elle a dans les yeux ce quelque chose qui me rappelle mon père, certains jours, les plus durs, quand une vie a filé entre ses mains mais qu’il n’a pas le temps, pas le droit de s’apitoyer, parce qu’il y en a d’autres à sauver.
Je détourne le regard pour ne plus la voir, fixe mes mains jusqu’à ce que l’ambulance s’arrête.

On descend, et j’ai froid ; j’observe au dessus de moi le paysage qui se transforme, l’infini nocturne piqué d’étoiles puis le plafond blanc aux néons trop lumineux.
Je dis « je veux marcher » et l’on ne me réponds pas, je dis « laissez-moi marcher » en essayant de me redresser, et on me repousse doucement pour me rallonger en me demandant de rester calme.
J’ai des images qui défilent sous mes paupières, un rire à mes oreilles, j’ai l'envie de gueuler et les yeux qui brûle. Je souffle encore « je veux marcher » et j’entends un « C’est bon, je m’en occupe ». Le brancard s’immobilise tout à coup, et je me sens l’envie de pleurer en reconnaissant la voix ; plus rien n’existe.

Il y a des voix, encore, mais je ne les entends plus ; et puis, le silence, le bruit des pas sur le carrelage, avant qu’il n’y ait son visage qui se penche au dessus de moi, un sourire presque timide au coin des lèvres, l’inquiétude dans le regard.
« Ça va aller ? Tu peux te redresser ? »
J’acquiesce lentement, m’appuie sur mes coudes, et il vient m’aider, une main dans mon dos, sa poigne sur mon bras. Je parviens à m’asseoir au bord du brancard, puis à me lever — non sans grimacer, non sans vaciller.
Il y a ses mains, ses bras qui hésitent, tout à coup ; face à lui, il tergiverse, le fils ou l’inconnu, la nuance est faible désormais, il faut croire.
J’assassine son dilemme, me laisse aller contre lui et il m’enlace dans la seconde ; il y a des larmes qui coulent sans un bruit, qui brouillent ma vue et trempent sa blouse.
Il s’écarte, sans relever ma faiblesse de l’instant, m’aide à retirer mon sweat et mon haut, puis m’incite à m’asseoir au bord du lit présent dans la pièce. Je m’exécute sans un mot, sans une plainte malgré la douleur qui semble se réveiller de nouveau. Il pose sur moi un regard soucieux, mais c’est celui d’un père, pas d’un médecin.
« Qu’est-ce qu’il s’est passé ? » Je détourne les yeux, incapable de soutenir les siens. « Une rencontre qui a mal tourné. » Je sens son regard comme une brûlure, d’abord sur mon visage, puis sur mes bleus, puis sur mes bras. Je serre les poings, je sais qu’il est blessé, blessé comme je me blesse, écorché par chacune des lignes tracée sur mes avants-bras. J’ai pas les couilles de dire quoique ce soit.

« Je vais m’occuper des sutures sur ton arcade et ta lèvre, et je t’emmènerai faire une radio. Est-ce que tu as mal quand tu respires ? »
Je hoche la tête lentement, pendant qu’il débarrasse mon visage du sang que j’y devine sans peine par la sensation poisseuse qui me colle à la peau. Alors, lentement, il vient faire courir ses doigts en touchers légers contre mon torse, jusqu’au point culminant de douleur qui m’arrache un grognement. Il se retire aussitôt, soupire. « Il ne t’a pas loupé. »
J’ai un rictus, léger — sans blague.

Quand les antidouleurs ont fait leur effet — quoique l’on a pu m’en donner que peu, à cause des substances ingérées ; et c’aurait été rien si je n’avais pas vomis —, que les gélules d’arnica sont avalées, que lèvre et sourcil sont recousus, d’un point chacun, je songe déjà à partir — m’enterrer sous les couvertures pour les soixante-douze heures à venir, ça m’a l’air d’un bon programme.
« Je serais plus tranquille de te savoir ici pour la nuit, Meo. » Je croise le regard de mon père — deux billes d’un bleu presque gris, orageux, impétueux. Il y a comme une pointe d’inquiétude dans sa voix, qui me serre le coeur. « Ça va, je vais appeler un taxi. » Je devine l’ombre qui passe dans ses yeux, serre un instant les poings sur les draps. « Parce que tu as l’argent nécessaire ? » Je me fige, baisse les yeux — comme un gosse pris en faute.
J’inspire, porte mon regard en direction de la fenêtre, aux stores encore ouverts. « Tant que je ne suis pas obligé d’enfiler la robe ridicule. » Il y a un silence, et son rire, tout à coup — hilare. Je lève les yeux dans sa direction, et il me regarde comme un complice. « Tu me vends du rêve, fiston. » J’incline la tête, et il hausse les épaules, sans se départir de son sourire.

Il me souhaite une bonne nuit pendant que je retire mon pantalon, ferme la porte dans son dos quand j’allume la télévision. Chaîne musicale, évidemment. Je me glisse sous les draps à l’odeur de produits aseptiques, rêches contre ma peau, qui me rappellent un peu trop ceux du service psychiatrique. Les mêmes partout, ternes, moroses, mauvais présage.
J’aspire au calme ; il ne dure qu’une poignée de minutes, avant que la porte ne s’ouvre sur deux silhouettes. Celle de la gamine, que je mets un temps à reconnaître — chienne de garde — et celle de l’infirmière, qui disparaît presque aussitôt.
Je me retrouve seul avec la gosse.
Elle s’approche, et je serre les dents.

« Ça va un peu mieux ? »
Sérieusement ?
« Qu’est-ce que tu fous là ? »
Est-ce que Marl m’a prévenu qu’il envoyait quelqu’un la chercher ? Peut-être. J’en sais rien. Je l’ai vraiment laissé faire ?
Quoiqu’il en soit je la toise, le regard noir, les poings serrés sur la couverture pendant que je me redresse, le dos contre la tête de lit métallique.
« Pourquoi tu m’as emmené ici alors que j’avais dit non ? On m’a pas planté, on m’a pas non plus tiré une balle, t’as cru quoi ? T’avais pas à t’en mêler, tu m’connais pas, qu’est-ce que ça pouvait bien te faire ce qui m’arrivait, au pire, putain ? »
Je gueule presque, j’écume de rage, je lui en veux, de ne pas m’avoir écouté, de m’avoir obligé à affronter mon père et mes vieux démons.
J’avais dit non, putain.
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MessageSujet: Re: This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo   This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo EmptySam 5 Aoû 2017 - 18:29




Feat Romeo R. Eastwood
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- Qu’est-ce que tu fous là ?

Boum. Ok, je m’attendais pas à l’accueil la plus chaleureuse qui soit après qu’il m’ait dit et clairement montré qu’il ne voulait pas aller à l’hôpital, mais quand même c’est pas une raison si ? Ceci dit je bouges pas d’un poil, fais style de ne pas y prêter attention et m’approche un peu plus. Mais si il est vrai, ça m’énerve un peu, que je suis pas sûre de comprendre une telle réaction, je me doute qu’il y a un problème disons, mais non je pouvais juste pas le laisser dans son état.

- Pourquoi tu m’as emmené ici alors que j’avais dit non ? On m’a pas planté, on m’a pas non plus tiré une balle, t’as cru quoi ? T’avais pas à t’en mêler, tu m’connais pas, qu’est-ce que ça pouvait bien te faire ce qui m’arrivait, au pire, putain ?

- Question d’humanité, je dirais ?

Je commence à répondre du tac au tac, signe de l’agacement qui ne me pousse pas vraiment à la réflexion profonde. J’ai pas réfléchi du tout, il est vrai, et en y repensant pendant quelques secondes je m’en dégoûte un peu.

Sérieusement, c’est moi qui parle d’humanité ?
Je soupire un bon coup, décide à ne plus le regarder pour me focaliser sur le sol, juste ne plus le regarder. Peut être que j’ai un peu des regrets, c’est vrai, pourtant je pense toujours avoir fait ce qui était mieux.

- Je sais pas, voir quelqu’un évanoui au sol, tu as une autre réaction logique toi ? Quand tu as un minimum de respect pour les autres, tu passe pas ton chemin même si ce ne parait « pas grave » pour l’autre. C’est aussi con que ça.

J’hausse les épaules, me calme un peu pour éviter d’en dire trop, comme tout à l’heure. Finalement, je viens face à lui, le regarder… Et il y a encore la gêne, que je tente en vain d’ignorer, pour avoir la force de l’observer dans les yeux. Je me trouve bête, parce que dans le fond ce n’est pas une question de « normalité », c’est juste… Juste….

- Puis… Il y avait ce besoin d’aide dans tes gestes, c’est bête mais tu crois vraiment que j’aurais pu te laisser comme ça ? Je peux pas comprendre pourquoi tu as la trouille d’être ici, parce que comme tu le dis je te connais pas. Mais ce qui est sur, c’est que je m’en serais voulu de t’avoir laissé la bas. Si ça t’amuse tu as qu’a pensé que je ne le fais que pour ma conscience, après. J’ai pas de compte à te rendre après tout.

Je pourrais partir sur ces mots, mais en fait j’en ai pas l’envie. J’aimerais attendre qu’il se calme avant de partir, ne pas rester sur cette impression d’avoir juste fait la pire chose pour lui. Parce qu’en vérité, ça m’afflige peut être un peu, juste un peu.
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MessageSujet: Re: This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo   This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo EmptyJeu 17 Aoû 2017 - 3:49

« Question d’humanité, je dirais ? »

Tu peux la remballer, ton humanité ; ça me brûle les lèvres mais je les retiens, les mots mauvais, les mots acerbes. Pourquoi t’étais là, pourquoi t’es passée de ce côté, pourquoi t’as pas fait le tour, pourquoi tu…
Merde.
J’devrais être chez moi en train de m’enfiler un fond de vodka, un joint entre les lèvres et une seringue dans le bras pour bien finir la soirée, m’abrutir un bon coup. J’devrais pas être dans un lit d’hôpital, ma sauveuse à quelques mètres de là, en train d’regretter la fin de soirée comme aucune autre.
Y’a la haine qui bouillonne, quelque part dans mon bide, l’envie d’exploser un truc, la lampe de chevet, une vitre, les meubles, n’importe quoi.

« Je sais pas, voir quelqu’un évanoui au sol, tu as une autre réaction logique toi ? Quand tu as un minimum de respect pour les autres, tu passe pas ton chemin même si ce ne parait « pas grave » pour l’autre. C’est aussi con que ça. »

Si tu savais, pauvre conne.
Elle bouge, elle s’avance, j’ai envie de lui cracher à la gueule, j’ai envie de lui dire de dégager, j’ai envie de lui faire du mal. C’est plus fort que moi, ça monte par vague, j’entends presque le tic tac insolent du détonateur sur le point de lâcher.
Démineurs en cours d’expédition, le fil rouge est compliqué à dénicher, emmêlé dans une ribambelle d’autres plus sombres qu’il vaudrait mieux prendre soin de ne pas entamer au risque de faire péter la machine avant l’heure — faudrait pas niquer un truc de plus, ce serait con.

« Puis… Il y avait ce besoin d’aide dans tes gestes, c’est bête mais tu crois vraiment que j’aurais pu te laisser comme ça ? Je peux pas comprendre pourquoi tu as la trouille d’être ici, parce que comme tu le dis je te connais pas. Mais ce qui est sur, c’est que je m’en serais voulu de t’avoir laissé la bas. Si ça t’amuse tu as qu’a pensé que je ne le fais que pour ma conscience, après. J’ai pas de compte à te rendre après tout. »

J’éclate de rire.
C’est plus fort que moi ; je ne suis même pas certain qu’elle ait eu tout à fait le temps de terminer avant que ça explose. Je ris, je ris mais ça sonne creux, ça sonne vide, ça sonne faux — et faudrait avoir été fini à la pisse pour ne pas s’en rendre compte.
Ça me brûle les côtes, l’impression qu’on m’ouvre les entrailles, ça s’achève en une quinte de toux qui me déchire une nouvelle fois.
Sur les traits une grimace, dans les yeux, dans le bide comme de la rage qui n’en peut plus d’être contenue, comme de la douleur, et elle n’est pas que physique.

« C’est pas qu’c’était pas grave, c’est qu’moi j’t’en aurais pas voulu d’m’avoir laissé là-bas, je ris de nouveau, déglutis, vague relent de gerbe et de bile au fond du gosier. C’est qu’j’avais envie qu’tu m’laisses là-bas, c’est qu’ça m’aurait arrangé qu’tu m’laisses crever comme un chien, gamine. »

Je glisse une main entre les mèches de mes cheveux, toujours humides de sueur, et rêches de sang séché, soupire sans plus la regarder. Je m’allonge, tant bien que mal, laisse échapper un soupir douloureux quand je n’ai plus à bouger, installé sur le dos à fixer le plafond, tout pour ne plus la regarder. J’éteins la télévision, pousse le vice jusqu’à en faire de même avec le plafonnier, puis je fixe le plafond, blanc, blanc, blanc, strié des raies de lumière qui franchissent les stores à moitiés ouverts.

Et c’est un soupir, juste un, que la colère a quitté, dans lequel ne restent plus que dégoût, fatigue et lassitude :

« Va-t’en, s’il-te-plaît. »
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MessageSujet: Re: This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo   This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo EmptyMar 19 Juin 2018 - 21:55




Feat Romeo R. Eastwood
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Un instant, je n’ose plus le regarder. C’est terrible, ce qui est sans doute la meilleure d’action de toute ma vie me donne l’impression d’être la pire, pour lui. Que ce soir, à défaut de pouvoir me haïr d’avoir détruit une vie, on m’en veux d’en avoir sauver une.  L’impression que mon acte ce soir, ne sera pas reconnu, quand on sait le mal fait avant. Comme si de toute évidence, je sais pas… Je ne méritais pas.

Bref.
Voilà qu’il éclate de rire, et ca me rendrais presque hors de moi si je ne me contrôlais pas, juste un peu. Mais si j’y parviens, c’est peut être surtout que son rire résonne étrange à mes oreilles, et j’aime pas ça bordel. J’en oublie mes doutes, ma culpabilité grandissante l’espace d’une seconde et c’est lui, juste lui, sur lequel mon esprit se concentre.

Il me fait mal.

- C’est pas qu’c’était pas grave, c’est qu’moi j’t’en aurais pas voulu d’m’avoir laissé là-bas. C’est qu’j’avais envie qu’tu m’laisses là-bas, c’est qu’ça m’aurait arrangé qu’tu m’laisses crever comme un chien, gamine.

Il me fait tellement mal.

Je suis là, immobile, à le regarder sans expression alors que peut à peu le noir prend place dans la pièce, ca commencer par la télévision qui s’éteint puis la lumière, il me semble, ne reste que les faibles lueurs causés par les volets mal fermés. Je suis la, comme une conne, ne sachant que dire, et c’est pas faute d’avoir l’esprit qui bouillonne à l’instant même, uniquement qu’aucun mots ne veulent sortir.

- Va-t’en, s’il-te-plaît.

La voix de Romeo parvient à me ressaisir et c’est un regard plus franc, un poil de colère, pas contre lui cependant, que je lui lance, quand bien même il semble vouloir m’ignorer. J’hésite, mais finalement recule d’un pas, m’apprête à me retourner mais me fige. Je sens mes poings se serrer quelques secondes, avant qu’un soupir s’échappe de mes lèvres.

- Tu peux dire ce que tu veux, Romeo, mais je considère avoir fait le bon choix. Je te connais à peine, c’est vrai, mais du peu que j’en ai vu, tu ne mérites pas de crever comme un chien. Et si c’est ce que toi, ou celui qui t’as tabassé, pensais, alors sache une chose : J’en ai rien à foutre.

Je me retourne pour de bon, avance vers la porte que je fixe, un instant, hésitante. Qu’il s'inquiète pas, j’ai l’intention de le laisser tranquille, pour ce soir. C’est un dernier regard que je lui lance, et un sourire moqueur que je ne peux retenir.

- T’as intérêt à être soigné avant demain si tu ne veux plus me voir, parce que j’ai bien l’intention de revenir ici à la première heure.

C’est sur ces mots que j’ouvre la porte, la franchi la seconde d’après.
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MessageSujet: Re: This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo   This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo EmptySam 4 Aoû 2018 - 1:16

Le silence, l’immobilité ; plus rien ne bouge dans la pièce, plus aucun bruit sinon nos deux respirations — la mienne, inlassablement, chaque fois une inspiration pour me tirer des ténèbres, et chaque fois la même question ((à quoi bon ?)).

À quoi bon l’oubli, pour les souvenirs qui remontent à chaque fois, sans relâche, cruels, mauvais ?
À quoi bon les nuits d’amour si ensuite bien les coups ?
À quoi bon espérer encore et pour mieux s’écorcher ?

À quoi bon ? À chaque fois la liste se fait plus longue encore, à chaque fois comme pour me rappeler comme le Ciel se fout de ma gueule, qu’il me donne un élan pour mieux me jeter contre le mur de béton — le même, encore, et encore, et encore, jusqu’à épuisement. Et même là, ce n’est jamais assez — jamais assez pour le repos, jamais assez pour fermer les yeux, jamais assez pour de bon.

À quoi bon ?

« Tu peux dire ce que tu veux, Romeo, mais je considère avoir fait le bon choix. »

Je ferme les yeux, et cette question qui se met à tourner en rond dans mon esprit — où sont-ils, les miens, de bons choix ?
Où sont-elles mes chances, les opportunités saisies, et puis les actes manqués, les lapsus, les pas de côté, les ratages, les gamelles, où sont les décisions qu’on prend sur un coup de tête, sur un malentendu, pour l’expérience ou la rébellion, ces « oui » prononcés au bon moment et qui nous envolent, où sont-elles, les bonnes routes empruntées, et tout ce qu’il ne faudra jamais regretter ?

Ça s’imprime en lettres vives sous mes paupières, des prénoms, des instants, tout ce qui compte et qui m’aide à tenir ((du peu que je tiens)). Je pense Olympe, je pense Meera, je pense les Devils, je pense mes pères, je pense la musique, je pense mon rêve — je pense y croire, je pense m’accrocher ;

mais ce soir la confiance s’efface, ce soir,
ce soir je voudrais du silence.

« ...mérites pas de crever comme un chien. Et si c’est ce que toi, ou celui qui t’as tabassé, pensais, alors sache une chose : J’en ai rien à foutre. »

Et elle s’éloigne — j’entends ses semelles qui grincent sur le linoléum, et puis de nouveau plus rien, je la devine qui s’arrête et puis hésite, je me tais, je laisse filer, pas la relancer, pas lui donner de raison de rester ;
je peux pas, ce soir, j’suis pas capable de garder la face.

« T’as intérêt à être soigné avant demain si tu ne veux plus me voir, parce que j’ai bien l’intention de revenir ici à la première heure. »

C’est une menace, ou une promesse ?

Je n’aurai jamais l’occasion de le lui demander — elle s’efface enfin, plonge de nouveau la chambre dans la pénombre lorsqu’elle referme la porte derrière elle, m’abandonne à mes démons qu’elle a fait prisonniers du même coup. Toutes ces questions sans réponse — et la douleur, et la violence, et les souvenirs qui reviennent par vague, les détails flous, et j’comprends pas

j’comprends pas comment
j’comprends pas pourquoi

est-ce que j’ai fait quelque chose ?
est-ce que j’ai dit quelque chose ?
est-ce que j’ai cherché, provoqué ?

est-ce que j’ai mérité ?

Je serre les poings et les phalanges me brûlent — je me souviens d’un autre temps, d’une autre époque ; j’étais jeune et moins brisé, encore capable de serrer les dents et d’encaisser les coups, de les rendre sans trembler s’il fallait ((mais déjà, déjà je rasais les murs et je pleurais la nuit)). J’me souviens d’un temps où c’étaient d’autres regards et d’autres poings, des insultes plus déchirantes que la douleur dans le bide et la mâchoire — le corps c’était rien, le corps il s’en remet, toujours, le corps il est solide ((c’est l’intérieur qui pète en morceaux)).

Les os se ressoudent, les peaux on les suture, les ecchymoses elles s’effacent, parfois on a des cicatrices, réminiscence des blessures de guerre d’autrefois — mais le dedans, le dedans qu’est-ce qu’on en fait, est-ce qu’on retire les éclats de mots comme les éclats de verre, est-ce qu’on suture les plaies au coeur comme celles aux paumes, est-ce qu’en passant de la pommade on peut avoir un peu moins mal ?
Est-ce que ça s’apprend, est-ce qu’on s’en sort ?

est-ce qu’un jour on arrête de se demander
est-ce qu’un jour on arrête de se demander comment mourir
est-ce qu’un jour on apprend à vivre
est-ce qu’un jour on apprend la vie et à l’aimer
est-ce qu’un jour on va mieux
est-ce qu’un jour on regarde en arrière en se disant « j’ai réussi »
est-ce qu’un jour on fait avec
est-ce qu’un jour le passé est une expérience
et l’avenir encore une chance ?


J’ai dû penser dans le vide pendant des heures — la porte s’ouvre et c’est mon père, les traits fatigués et qui finit bientôt sa garde, qui devine sans doute les larmes et le dedans chaviré, qui voulait simplement me voir et qui finalement s’approche, et sa main sur son front, et puis un baiser sur la tempe ((comme quand j’avais douze ans)). Il s’efface sans un mot — mais rien dire c’était déjà assez, d’être là c’était suffisant, j’voudrais lui dire mais j’ai jamais su comment.

Quand l’aube point de l’autre côté des stores et que je sombre enfin,
je pleure encore.

Lumière vive qui m’arrache au sommeil ((vide de rêve)), et l’infirmière qui tente d’échanger des politesses — mais j’ai le crâne pris en étau, les revers de l’alcool de la veille. Sur un plateau petit déjeuner industriel, la nana m’aide à me redresser et je serre les dents, sans trop de compassion elle me demande de choisir deux-trois trucs à la commande et je fais du hasard, elle me sert et puis sort de la pièce en m’annonçant une visite, sur le coup je tilte pas. J’me dis juste pauvre conne sans douceur, dans sa tête j’vois d’ici le tableau — pour elle j’suis qu’un branleur qui s’est mis minable, s’est battu au comptoir et s’est fait jeter d’un bar, qu’importe la vérité c’est le plus plausible et pour elle j’suis sûrement qu’un gars qui vole du temps qui serait utile pour d’autres — ceux qui en ont vraiment besoin.

J’ai pas d’appétit, l’envie de vomir rien qu’à l’idée de manger — à la place je m’enfile trois verres d’eau dans leur gobelet en plastique, ma gorge n’en est pas moins sèche et douloureuse, et chaque fois que j’déglutis ça me lance dans les côtes, le moindre geste tiraille et y’a que ma dignité pour serrer les dents et faire mine de rien. Par habitude, j’allume la télévision sur une chaîne de clips, j’cherche une position pas trop douloureuse, et je grignote du bout des dents une tartine sèche et insipide — rien n’a d’autre goût que celui de carton, ce matin.

La suite, l’emploi du temps de l’hôpital — la douche, que j’insiste pour prendre seul et malgré la douleur, dans le miroir j’admire l’étendue des dégâts, les hématomes entre le bleu et le noir étalés sur mon torse ((sur la côte c’est pire, j’ose même pas envisager la casse en dessous)), et puis ma gueule cassée ((les points de ma lèvre et de mon arcade, des cicatrices qui resteront sans doute)), et l’oeil au beurre noir, et l’air fatigué, la gueule de trois mètres de long, les cernes, le vide dans les yeux et le teint pâle ((j’ai déjà l’air crevé)).

De retour sur mes draps, habillé de fringues propres que mon père m’a rapporté ((ravi de savoir que j’fais toujours la même taille qu’à dix-sept ans)) de la maison plutôt que de dormir, parce qu’on m’a promis un départ en fin de journée, j’savoure ma solitude, j’commence à papillonner parce que ma nuit courte n’était pas assez, j’dois avoir trois heures au compteur ou un peu moins — j’avais oublié, jusque là, que le calme n’allait pas durer.
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This life to be saved, aftershocks of the hatred - Romeo
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