au milieu de l'hiver, j'ai découvert en moi un invincible été.
Histoire
NAOMIIE ALYN ÉTAIT À NOAH NEVENSCHEINDER CE QUE LE JOUR ÉTAIT À LA NUIT. Et pourtant ça ne les avait pas empêché de se marier. Ils avaient huit ans d'écart et tout un monde qui les séparait. Lui il avait fait la guerre depuis que l'armée l'avait sorti de la misère, et Elle reconstruisait petit à petit sa vie après que la mort ait frappé à sa porte et emporté sa famille. Lui faisait des cauchemars à n'en plus finir quand Elle lui avait ouvert les bras pour qu'il vienne s'y réfugier. Lui était resté à son chevet quand une voiture l'avait fauchée, Elle, pour sauver la vie d'un homme qu'elle aimait jusqu'alors plus que lui.
Lui n'avait jamais prévu de l'aimer -ni d'aimer qui que ce soit- comme il l'aimait Elle, mais ça avait été plus fort que lui. Il n'avait jamais été sûr de rien mais au moins il était sûr de ça.
QUAND NOAH AVAIT ÉTÉ RENVOYÉ À WASHINGTON PAR LE GÉNÉRAL, IL S'ATTENDAIT AU PIRE. Sans savoir que le meilleur l'attendait chez lui. «
Depuis combien de temps ? » Noah avait versé peu de larmes dans sa vie, et encore moins des larmes de joie. «
Ça va faire trois mois. » Elle embrassa ses joues trempées tandis que ses yeux se perdaient sur son ventre «
Je ne sais pas, Naomiie... » Il prit sa tête entre ses mains, et toutes les pensées qu'il avait tues au cours de leurs trois années de mariage resurgirent. «
Il me reste au moins vingt ans de service, je ne veux pas t'imposer ça. Je ne suis même pas sûr de pouvoir être là quand- » Il fut arrêté par son épouse, qui le fit taire d'un geste de la main. «
Je sais déjà tout ça. On s'en sortira, on s'en sort toujours. » Un sourire suffit à apaiser le soldat, qui prit la jeune femme dans ses bras. «
Tu vas être papa, Noah. On ne sera pas une famille parfaite, mais elle le sera si tu y crois. » Il acquiesça, et se laissa bercer par sa voix qui lui murmurait tout ce qu'il avait besoin d'entendre. «
Cet enfant ne sera jamais seul. Il m'aura, moi, et tu seras là, toi aussi. » Noah prit sa femme dans ses bras, et la remercia -encore, pour à peu près tout ce qui avait de beau dans sa vie. «
On pourrait demander à Lei d'être son parrain. » Il s'autorisa même un léger rire à l'idée de la réaction qu'aurait son frère lorsqu'ils lui proposeraient.«
On peut aussi proposer à Judith d'être marraine. » Noah se redressa, embrassa Naomiie et la serra dans ses bras. «
Le pauvre gamin ira tout droit en Enfers si on fait ça. » Mais il allait reconsidérer la chose.
ELROS LEI NEVENSCHEINDER ÉTAIT UN ENFANT EN BONNE SANTÉ. Il grandit sur la base militaire, entre un père présent la moitié de l'année et une jeune maman pleine de bonté et d'enthousiasme. Comme l'avait prédit Naomiie, Elros ne fut jamais laissé seul, et leur famille imparfaite s'agrandit, huit ans plus tard. «
Papa ! Papa ! C'est un petit frère ? » Noah portait encore son uniforme de la veille, lorsqu'il avait pris un avion en catastrophe au moment où son frère l'avait appelé pour l'informer que Naomiie allait accoucher. Il se laissa tomber sur une chaise et laissa son fils grimper sur ses genoux. «
Ouais, un petit frère. On va l'appeler Nólairë, ça te va ? » Le gamin acquiesça, en se disant que n'importe quoi lui irait du moment que ça plaisait à sa maman.
SA MAMAN LUI AVAIT TOUJOURS APPRIS À AIDER SON PROCHAIN. Mais il y avait des fois où il n'y arrivait pas. «
Déjà rentré, mon chéri ? » Naomiie balaya d'un tendre geste de la main les feuilles restées coincées dans la chevelure blonde de son fils. «
Mais où est Diana ? » Il haussa les épaules, ce qui attira la curiosité des trois autres adultes installés dans le salon. «
Je sais pas, je l'ai laissée dans le bois. Elle était trop relou. » Les Nevenscheinder et les Harrington-Levy passaient une semaine par an, tous les étés, dans une résidence secondaire qui appartenait à la richissime famille Harrington, et qui bénéficiait d'un domaine si grand qu'il était toujours agréable de jouer dehors. «
Bravo l'éducation, je te félicite pas Noah. » Le rire de Judith résonna dans la grande pièce tandis que Naomiie semblait être la seule à vraiment s'inquiéter. «
J'aurais fait la même chose à sa place, je peux pas lui en vouloir. » rétorqua son père, conscient que sa filleule avait beau être la fillette qu'il aimait le plus au monde, elle avait trop pris de sa mère pour en vouloir à son fils. «
Papaaaaa ! » Une tornade brune surgit sur le palier de la porte et accourut jusqu'au salon pour se jeter dans les bras de l'homme assis dans le fauteuil. «
Elros a pas voulu m'aider à sortir du trou dans lequel il nous a fait tomber ! » sanglota-t-elle en enfouissant sa tête dans le cou de son papa pour pleurer toutes les -fausses- larmes de son corps. «
Elle ment, Matthew ! » se défendit le concerné. «
Je voulais pas passer par là c'est elle qui a insisté ! » Il lâcha sa mère pour retourner dans le salon et faire comprendre à tout le monde que plus les années avançaient et plus sa copine Diana devenait insupportable. Bien qu'on lui ait appris depuis tout petit à respecter les gens -et les filles, notamment- il y avait des jours où il en était plus capable. Ce n'était pas faute d'avoir essayé, mais cette fille-là, il la connaissait depuis qu'il était sorti du berceau, et bien qu'ils passaient toujours de très bons moments ensemble, il y avait des jours où elle était vraiment trop chiante.
IL AVAIT 14 ANS QUAND SON POUVOIR SE MANIFESTA. Et il eut de la chance que ce ne soit pas à un moment où il s'occupait avec Nolan -comme il appelait son petit frère au nom trop compliqué- ou encore lorsqu'il était seul avec sa mère. En fait, il était avec son père ce jour-là, et Noah Nevenscheinder était un soldat qui savait encaisser les coups. Ils venaient de se quereller sur un sujet qui n'avait plus grande importance -l'absence de Noah quand sa famille avait besoin de lui, peut-être ?- et bien qu'ils soient tous deux de nature tranquille, il leur arrivait -et c'était leur plus grand point commun- de se laisser emporter par leurs émotions, et c'était au terme de cette dispute que le champ magnétique autour de lui s'était inversé, envoyant son père valser à l'autre bout de la pièce. «
Je suis désolé Papa, je voulais pas... » Il n'avait pas idée de ce qu'il venait de se passer, simplement que c'était sa faute. Mais Noah s'était relevé, et il avait compris -après tout, cela faisait partie de ses gènes à lui. «
C'est rien fiston, j'ai connu pire. » Il l'avait ensuite pris dans ses bras, et il lui avait promis que tout irait bien.
Et d'une certaine façon, cela avait suffit à Elros ; si c'était Papa qui le disait.
LE REMÈDE À L'ANXIÉTÉ SE TROUVAIT CHEZ ELROS DANS LE TRAVAIL. D'une façon ou d'une autre, les maths et la physique lui prenaient bien assez la tête pour lui faire oublier qu'il n'était pas comme les autres. Et depuis qu'ils avaient déménagé à Astrophel City, qui était bien la seule ville capable de s'occuper de gars comme lui. «
Joyeux anniversaire mon chéri ! » Elros sursauta et décolla les yeux de l'exercice qu'il avait décidé de finir avant de descendre déjeuner avec sa mère et son frère, mais Naomiie en avait visiblement decidé autrement. La jeune maman et la petite tête platine qui la suivait partout firent irruption dans sa chambre, avec une petite boîte en carton sertie d'un noeud purement décoratif. «
J'ai laissé la boîte ouverte, c'était pas possible autrement parce que- »
Ouaf ! Elros leva un sourcil, perplexe, avant que le couvercle ne saute, laissant apparaître une petite boule de fourrure blonde aux grand yeux noisette. Nólairë poussa un cri de joie qui se mêla aux aboiements joyeux du petit chiot «
On se disait avec Papa que ça ne devait pas être trop facile pour toi de tout recommencer tout seul, et il se trouve qu'une de mes amies a mis au monde une petite portée de chiots absolument adorables. Celle-ci était la petite dernière, n'est-elle pas adorable ? » Un véritable sourire -le genre qui fait briller les yeux- éclara le visage fatigué d'Elros, qui ne sut quoi ajouter, alors il se contenta de prendre sa mère dans ses bras. Il baissa ensuite les yeux vers son petit frère qui semblait déjà avoir adopté la nouvelle membre de leur joyeuse famille. «
On va l'appeler Maya, ça te va ? »
NAOMIIE NE RETINT PAS UNE EXCLAMATION DE SURPRISE EN RETROUVANT SON FILS AVEC UN OEIL AU BEURRE NOIR. «
Oh mon Dieu ! » Elros grimaça -pas de douleur, plutôt d'embarassement. Elle s'approcha de lui et le garçon esquissa un mouvement de recul. «
C'est rien, Maman. » Elle s'installa sur le lit, sans rien dire -dans ces moments-là, Elros ressemblait à son père et le silence était bien plus fort que les mots. Il resta un moment sans rien dire, avant de lever les yeux vers sa mère. «
Ils s'en sont encore pris à Valentino. Quelle bande de racistes sans cervelle... » Ce n'était pas la première fois que son fils aîné se retrouvait au coeur d'une bagarre qu'il n'avait pas provoquée. Mais Naomiie avait compris, après toutes ces années, que le réprimander ne mènerait à rien -il avait le coeur tendre, ce garçon, et s'en voulait suffisamment après coup pour ne pas en rajouter une couche. «
Je vais te faire un chocolat chaud. » Elle l'embrassa sur le sommet du crâne et quitta la chambre, laissant à Elros le temps de réfléchir à ce qu'il avait fait, pour mieux pouvoir en discuter avec lui.
QUAND TROIS OFFICIERS EN UNIFORME AVAIENT SONNÉ À LA PORTE EN PLEIN MILIEU DE LA JOURNÉE, NAOMIIE S'ÉTAIT PRÉPARÉE AU PIRE. Mais elle s'était promis de ne rien laisser paraître -parce que ses fils étaient là près d'elle, et qu'elle se devait d'être forte. Mais elle n'avait pu se résoudre à les laisser à la maison, alors ils s'étaient rendus tous les trois à l'hôpital, ensemble. «
Il va s'en sortir, Nao. Tu connais Noah... » Nolan dormait dans les bras de leur oncle Lei, qui était venu dès que sa belle-soeur l'avait appelé pour l'informer qu'on avait rappatrié Noah suite à une blessure grave qu'ils n'avaient pas été capables de traiter avec les moyens qu'ils avaient sur place. Elros se pencha et prit les mains de sa mère dans les siennes, attirant vers lui son regard embué de larmes. «
Lei a raison. C'est Papa, il revient toujours. » Elle esquissa un sourire un peu faible et acquiesça, avant de prendre son fils dans ses bras. Et encore une fois, elle se raccrocha à ce qu'elle avait de plus cher pour ne pas perdre espoir.
CET ÉTÉ LÀ, ELROS L'AVAIT PASSÉ À TRAVAILLER. Noah s'était réveillé, et on l'avait assigné à résidence jusqu'à ce que son état s'améliore. Pour ne pas perdre son temps -et puisqu'ils avaient tous décidé qu'ils ne partiraient pas en vacances cette année- Elros s'était mis en tête de mettre de l'argent de côté pour le projet qu'il avait de devenir médecin militaire suite à ce qui était arrivé à son père. Il troqua la maison de vacances avec les chantiers de reconstruction d'Astrophel City -qui grouillaient en ville vu le nombre de spectacles qui s'y déroulaient par jour- écrasé sous un soleil de plomb. Il avait toujours eu l'habitude de passer inaperçu, mais le jour de la rentrée -avec son changement de condition physique et les hormones, certainement- il réalisa que les regards sur lui avaient changé. Et cela suffit à lui faire comprendre que les ennuis venaient tout juste de commencer.