Les cris retentissent, assourdissants ; tout n'est que chaos et toi, toi, t'es là, au milieu de ce bordel, à essayer d'évacuer les gens, à chercher la source de cet enfer.
C'est ton boulot après tout ; il y a juste des tâches plus attrayantes que d'autres.
L'écarlate est omniprésent ; trop, comme le regard terrorisé de bêtes traquées, de ces gens, monsieur tout le monde, agents de l'ordinaire perdus dans la folie humaine.
T'espères, non, t'as pas le choix – tu vas trouver la source de tout ça et l'arrêter, et plus vite que ça. C'est ce que tu souhaites, au delà de ton job, de ton contrat ; au delà des apparences, à l'intérieur ça brûle et tu veux y mettre un terme.
Et elle est là, au détour d'un carrefour, là haut sur son perchoir à contempler le monde auquel elle aime foutre le feu. Là et son regard dément, son rire fou, son âme tordue. Là, la gosse que t'aimerais parvenir à comprendre, celle que tu devrais briser pour l'arrêter, mais que tu souhaites aider, encore un peu.
Quand t'aimerais pas qu'elle crève, tout simplement.
Elle est folle, folle et dangereuse, et tout ce qui t'es de plus antagoniste. Et elle te voit ; t'accroches sa rétine et tu avances lentement, calmement ; tu sais que tu repars pour un nouveau combat.
Combien de victimes, cette fois ?
Elle est ton poison, pourrait devenir obsession ; celle qui te pousse à te battre, celle qui fait pulser violemment le sang à tes tempes, celle qu'il te faut arrêter à tout prix –
avant que tu ne t'y brises, avant que tu ne l'éclates –
et ton âme avec.
Ô si tu pouvais mettre un terme à cette triste comédie !
« Tu t'es perdue ? Ou tu imagines qu'il n'est pas encore trop tard pour les insectes qui grouillent sous nos pieds? Il est trop tard, chérie. Tu as raté le plus beau spectacle de la semaine. »
Ta mâchoire se contracte ; tu sers les dents, tu luttes contre la colère, cette rage sourde que tu canalises encore comme tu peux.
« Bonjour Blast. C'est toujours un plaisir de se croiser. »
Tu ramènes ton étrange gadget vers toi, la brandis à la manière d'une épée, le regard fixé dans ses prunelles brisées par le rire qui la secouerait presque.
« Et il n'est jamais trop tard. J'aimerais penser de même te concernant, mais j'avoue que c'est plus compliqué. Descend de là. »
Le plus beau spectacle de la semaine ?
Sa gueule grande ouverte dans un caniveau, peut-être.

how can we pretend

La colère coule dans tes veines, et malgré tout ton self-control, tu sais pertinemment que c'est visible. Blast a le don de te bousculer, casser la compassion et briser la douceur que dessinent ton âme. T'as envie de lui péter un truc ; envie de lui faire mal, envie de l'arrêter – envie de tout arrêter avant que ça ne dégénère plus encore.
Parce qu'elle te tire vers le bas.
Tu restes pourtant là, la tête haute, comme s'il était de ton devoir personnel – à toi, Imogen, pas à Topaz l'héroïne – de mettre un terme à sa folie. Parce que clairement, il lui manque une case. Et ça fait bien longtemps qu'essayer de la comprendre n'est plus une priorité à tes yeux.
« Je ne sais pas, la vue est belle, d'ici. »
Ton regard ne quitte pas le sien, mais tu visualises parfaitement les corps étendus autour de ta silhouette, et tu sens ton cœur se serrer. Belle ? En quoi une vue pareille est-elle belle... ? Si c'est par pur désir de te tenir tête, qu'elle ne dise pas des choses pareilles ; qu'elle te tienne tête, mais... mais non. Il n'y a rien de beau dans un massacre.
« Tu diras à la mère du gamin décédé à tes pieds qu'il n'est jamais trop tard. Tu diras à l'amant de la femme qui vient de rendre son dernier souffle derrière toi qu'il n'est jamais trop tard. »
Et tout ça, c'est censé être « beau » ? Tu ne te démontes pas, tentes de sonder les tréfonds de son âme dans son regard d'un vide abyssal. Tu ne saurais y déceler rage ou plaisir ; il n'y a guère humanité dans ces yeux-là.
« Il est trop tard. »
Tss.
« Tu es agaçante, Blast. »
Comment t'arrives à rester calme ; comment t'arrives à la qualifier si sobrement, c'est un mystère même pour toi. Ton tempérament initialement doux doit aider. T'as appris à garder ton sang froid ; mais tu sais que cela risque de ne pas durer. T'aimerais être vulgaire pour être parfaitement honnête ; lui répéter des choses qu'elle sait déjà et dont elle se délecte sûrement, rentrer dans son jeu en pleurant les victimes de cette folle furieuse.
Et t'as du mal à comprendre ce que foutent les sponsors, à la laisser faire.
Vraiment ; plus tu vois comment fonctionne la machine, plus tu as du mal à voir comment elle peut tenir debout. Qui accepterait une telle tarée en liberté... ?
Carvel&Son a vraiment un souci.
Et la voilà qui chute ; la voilà qui descend vers toi, avec ce regard d'un mépris que tu savourerais presque. Tu ne comprends pas bien ce qu'il y a de méprisable à être quelqu'un de bien ; tu préfères amplement être méprisée pour cela que pour être comme elle.
En fait, tu mets le doigt dessus ; plus que du mépris, tu ressens de la pitié pour cette chose-là, qui n'a d'humain que la morphologie.
« Et bientôt il le sera pour toi aussi. »
Un sourcil se hausse pour toute réaction ; ah oui ? C'est la combientième fois déjà, qu'elle te menace ?
Jusqu'à preuve du contraire, tu te portes merveilleusement bien, pourtant.
L'écarlate se soulève dans une danse macabre et tournoie presque joliment autour de ton ennemie ; vérifiant d'un geste rapide que ton armure – parfois quelque peu encombrante mais bien salvatrice – est en place. Tu approches d'un pas lent, armes ton gadget sur arme à feu – à manier comme une mitraillette – et commences à accélérer le pas ; sers les dents, fixes ta cible, prépares-toi au combat.
« Des menaces toujours des menaces ! Mais tu ne gagneras pas, Blast ! »
Gagner ? Qui parle de gagner ?
Ta vie, la sienne, c'est ça, ce qui est en jeu ?

how can we pretend

Blast danse ; elle danse avec tes attaques quand tu cours vers son venin. Cette fois encore, les paroles seront vaines et le combat fera plus de blessés autour de vous que sur vos propres corps. Tu culpabilises. Tu vois une de ses créations d'écarlate te foncer dessus et c'est de fort peu que tu l'évites ; une marque claire dessine la caresse mortelle de ton ennemie sur ton armure, et tu sais pertinemment que malgré le blindage de celle-ci, une coup trop violent d'un tel projectile te serait fatale.
Bien sûr que tu le sais, ça fait longtemps que tu le sais.
Comme ça fait longtemps que vous jouez cette mascarade.
« Qu'est-ce que tu n'as pas compris, depuis la dernière fois? »
Un claquement de langue ; tu lui envoies un regard mauvais, courroucé.
Elle connaît ta faiblesse ; celle-là même qui limite tes coups et t'empêches de viser juste. Celle-là même qui l'écorche sans jamais la tuer, qui lui donne des munitions sans jamais s'arrêter.
Elle connaît ta faiblesse ; et elle te fait la mépriser. Toi qui considère ton Humanité, ta compassion comme une force, elle te fait le regretter, vouloir pouvoir tuer. Car si tu pouvais juste l'achever, plus personne n'aurait jamais à pousser son dernier soupir de par sa faute. Combien de vies pourraient être épargnées ?
Contre qui es-tu la plus fâchée ; elle ou toi-même ?
Et subitement tu tiques ; tu entends les échos des pas qui fuient, entends les cris et la vie derrière elle. Tu comprends où elle se dirige ; comprends qu'elle n'a pas fini de jouer et que la dernière fois n'est pas suffisante à ses yeux. Alors tu changes le mode de ton arme et enclenche la fonction filet.
« La dernière fois, des gens ont failli mourir à cause de toi. »
À cause de toi.
Ton regard s'enflamme.
À cause de toi.
Tes gestes sont plus violents, plus brusques, signes que tu perds patience – que ton sang-froid ne durera pas bien longtemps si tu ne te reprends pas immédiatement.
À cause de toi.
Parce que tu es faible, Imogen.
Tu l'entendrais presque susurrer, rire à ton oreille ; ta faiblesse tant méprisée dont tu ne sait toi-même plus quoi penser.
« Ça ne recommencera pas. »
Tu parles en serrant les dents ; et tu vises ses jambes d'un mouvement brusque et furtif, active la fonctionnalité qui lui fauche une jambe ; et tu tires de toutes tes forces pour en changer la position, la trajectoire. Tu vois son équilibre défaillir mais tu doutes que cela soit efficace ; alors tu fonces. Quitte à t'exposer à ses armes, tu préfères te mettre en avant pour qu'elle ne puisse plus se focaliser que sur ta personne. Tu vises la tête, t'essayes de lui fracturer la mâchoire, sans doute ; t'évites de peu un coup, un autre perce presque ton armure au niveau du visage.
T'oublies de te protéger, peut-être.
Tu veux qu'elle ne s'occupe plus que de toi.

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