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Le PDG de la X-TREM Factory entretiendrait une relation des plus intenses avec sa vice-présidente. On espère que ce n’est pas cette affaire qui a distrait l’ancien Phoenix de son travail et qui a entraîné un manque de sécurité lors de la dernière conférence de presse de l’entreprise où à eu lieu une explosion causant la mort d’un de ses haut-gradés...
Le mystérieux « Mist » dont l’apparition soudaine a récemment secoué la ville serait en fait une association de trolls désoeuvrés voulant profiter de la panique des récents attentats pour gagner plus de popularité sur les réseaux sociaux.
Il paraîtrait que le fondateur de la ville Edward Astrophel aurait été le descendant direct de Diogène, le philosophe grec qui vivait dans un tonneau. Incroyable !
Le souffle chaud au bord des lèvres, le regard menaçant sous ses longs cils noirs, elle détaillait l’intérieur du réfrigérateur, un air d’insatisfaction dans sa moue boudeuse et irritée. Ses jambes lâches contre le fauteuil et sa poigne fermée sur la porte du frigo, elle le ferma sans ménagement, affable et morfonde au fond de sa chaise roulante. Elle observe autour d’elle, voyage de quelques roulements entre la cuisine et le salon, et finit par quitter l’appartement en enfilant tant bien que mal des chaussures noires sans attaches et un imperméable de la même couleur.
Il n’y avait plus de confiture. Rendez-vous compte du drame. Il n’y avait plus de confiture, bon sang.
Autumn avait pris l’habitude qu’on la regarde lorsqu’elle sortait, qu’on la prenne en pitié ou qu’on la méprise pour des pensées qu’elle n’avait pas – des fabulations paranoïaques. Elle avait appris à ignorer le regard des autres qui, à défaut de ne pas toujours être expressif, était très souvent compatissant plutôt qu’agressif – c’était toujours ça de pris. Si au début elle avait eu tendance à apostropher le premier malheureux qui osait lui proposer son aide – elle refusait l’idée qu’elle était dans le besoin -, elle s’en était accommodée, sans jamais accepter la piètre bonté d’autrui pour autant.
La bonté. C’était un concept qui lui échappait complètement. Risible.
Au supermarché, elle avait rejeté la proposition pourtant charmante d’un des employés, qui lui intimait qu’il pouvait bien faire ses courses à sa place – c’était tout de même plus facile d’être sur ses deux pattes pour atteindre les rayons du haut. Mais il ne lui fallait qu’un pot de confiture, ça ne devait pas être caché au plafond, pas vrai ?
Lorsqu’elle arriva devant le rayon, elle ravala immédiatement sa fierté – elle lui était revenue comme une claque. Il fallait évidemment que les rayons soient arrangés pour que sa confiture de fraises soit tout en haut d’un étalage. Une pensée fugace surgit de son esprit, amère, qui prétendait qu’ils devaient forcément avoir fait exprès, puisque la dernière fois qu’elle était venue avec Denis, ce pot était situé trois étages plus bas. Misère.
Un soupire siffla entre ses lèvres et ravalant ses principes, elle s’était dirigée vers le premier qui se présentait – un client, visiblement, dont elle ne discernait que peu le visage à cause de son capuchon. Elle l’arrêta, du bout des doigts contre la manche de son haut, le regard complaisant et les lèvres prêtes à articuler ses prochains mots. Mais lorsqu’il se retourna, elle se sentit tout à coup prise de court, perplexe et abasourdie par la coïncidence qui avait fait qu’elle tombe exactement sur lui à ce moment rare et précis où elle était, seule, sortie de chez elle. Il devait forcément s’agir de quelque chose d’aussi saugrenu que le destin ou une embrouille de ce genre.
Elle plissa les yeux, fronça les sourcils, et un maigre sourire, discret, invisible pour qui ne le cherche pas, se dessina au bord de ses lèvres. Elle n’était plus si sûre, mais elle était intimement persuadée que c’était effectivement..
« Sheepy ? »
Elle se mordit l’intérieur de la joue, fébrile à l’idée d’évoquer le passé. Certaines personnes insatisfaites de leur situation présente aimaient ressasser les événements passés, le bonheur d’antan. Autumn préférait simplement ignorer et vivre dans le flou – vaguement vivante sans vraiment le sentir. Elle trouvait la vie moins douloureuse ainsi. Mais effacer son passé était moins évident lorsqu’il ressurgissait au travers d’un personnage non anodin – qui avait joué un rôle tout particulier lorsque son bonheur était entier.
Shawn, elle l’avait aimé comme un frère, c’était son ami. Ils avaient joué à chat et avaient ri, s’étaient disputés et s’étaient réconciliés. Le temps et les circonstances avaient fini par les séparer, et cruellement, brutalement, leurs souvenirs communs n’étaient devenus plus que ça. Des souvenirs. Peut-être un peu fades, mais toujours aussi précieux, car ils avaient existé, quelque part, au fond de leurs cœurs déchirés.
Elle baissa les yeux, courba le dos. Les jours heureux étaient derrière eux.
« Shawn, c’est.. Autumn. Hah, j’avais juste besoin d’aide pour attraper un pot de confiture. Ils l’ont changé de place, là-haut, le pot avec le couvercle vert et blanc. Tu pourrais me l’attraper ? »
Elle l’indiqua vaguement d’un mouvement de main, et son sourire, aussi maigre soit-il, s’était effacé. Elle n’avait que peu envie d’évoquer ce qu’ils avaient été, n’avait que peu envie de se rappeler à quel point elle était différente et bien plus sordide qu’autrefois, lorsqu’elle riait aux étoiles et chantait au soleil. Et sa mine s’assombrit lorsqu’elle constate que lui aussi, avait bien changé.
« Hah, je dois halluciner, quelles étaient les chances que ce soit toi que je croise la seule fois où j’apostrophe un inconnu depuis des mois.. »
Elle sourit, presque intimidée, maintenant. Et elle hausse les épaules, faisant fuir la bancale conversation qu’ils auraient pu entretenir à propos de sa constatation futile. Elle se sentait si bête, maintenant.
Shawn se rendait rarement au supermarché. Les courses, c'était surtout Raven qui les faisait. Après tout, c'était sa sœur la fée du logis. Et elle demandait rarement l'aide de ses frères pour les tâches ménagères. Sans doute parce qu'elle trouvait qu'ils avaient assez à faire de leur côté, ce qui n'était pas complètement faux. Néanmoins, il fallait croire qu'une quelconque divinité supérieure trouvait ça profondément injuste et sexiste et qu'elle avait trouvé une solution pour y remédier. Sa jumelle avait attrapé une fièvre carabinée et se reposait donc dans son lit. Quant à leur frère aîné, il devait se trouver quelque part en ville avec ses amis révolutionnaires. Autrement dit, c'était à lui de refaire leur stock de nourriture aujourd'hui et la corvée l'agaçait avant même de partir de la maison.
Avant de s'en aller, le faux elfe passa voir sa sœur pour s'assurer qu'elle allait bien. Il la trouva profondément endormie et referma la porte silencieusement avant de prendre l'argent réservé aux courses, la liste et ses clés. Il glissa les trois choses dans une poche intérieure de sa tunique bien à l'abri et sortit enfin dans la rue après avoir rabattue sa capuche sur sa tête. Ses mains glissèrent avec une aisance que seule l'habitude procurait dans les poches de son pantalon beige. Le supermarché ne se trouvait pas trop loin de la maison et il y serait dans quelques minutes. La suite ne serait pas plus compliquée, attraper quelques bricoles pour pouvoir manger pendant quelques jours, payer et rentrer. Un jeu d'enfant. Même lui avec son enfance dorée pouvait le faire.
Un sourire sarcastique apparut sur ses lèvres à cette pensée. Il donnerait cher pour apercevoir l'expression des aristocrates qu'il fréquentait pendant leurs soirées à sa vue dans un supermarché des plus ordinaires. Eux devaient certainement envoyer leur majordome ou leur cuisinier personnel à leur place. Mais le couple Anderson avaient choisi la simplicité depuis leur première rencontre et leurs enfants marchaient dans leurs pas. Mais il était difficile de le savoir quand on ne voyait pas au delà des apparences et Shawn était sûr que plus d'un serait choqué de le voir dans un lieu aussi commun. C'était donc si dur d'imaginer que les célébrités et les fortunés étaient des gens normaux ? A croire que oui.
Le blond pénétra dans l'endroit et le parcourut aussitôt des yeux. Il n'était pas un client assez régulier pour connaître l'emplacement de chaque chose, mais avec l'aide des panneaux informatifs il devrait s'en sortir. L'aide des employés ne serait demandée qu'en dernier recours vu sa fierté et son amour propre. Il attrapa un panier et imagina encore une fois la tête des gens s'ils savaient qui se cachait derrière cette capuche couleur émeraude. Surtout que cela lui donnait un air de petit chaperon rouge. L'image le fit sourire brièvement une nouvelle fois alors qu'il attrapait un paquet d'œufs pour le déposer dans son panier rouge. Il se promena ainsi pendant quelques minutes dans les allées, remplissant son panier au passage. Alors qu'il cherchait le chocolat préféré de la fratrie des yeux, il sentit une main se refermer sur sa tunique.
Shawn se crispa alors légèrement, n'étant pas très fan des contacts physiques aussi imperceptibles soient-ils. Néanmoins, il prit sur lui et ne se dégagea pas violemment, se contentant de se retourner pour apercevoir la personne qui le dérangeait. Il fut alors surpris d'apercevoir une jeune fille en chaise roulante. Elle avait beau être dans la même allée que lui, il n'avait pas vraiment fait attention à son environnement, trop occupé à faire ses courses. Son regard ne fut pas traversé par de la pitié, ni par de la compassion, restant aussi illisible qu'à son habitude. Non, il ne la prendrait pas en pitié, même si c'était triste de perdre ses jambes à un âge aussi juvénile. Ou plutôt de les perdre tout court.
Elle était jolie, assurément, même s'il n'était pas vraiment un expert en la matière. Et elle lui disait vaguement quelque chose sans qu'il puisse mettre un nom sur son visage. Il la fixa pendant quelques secondes avant qu'elle ne prenne la parole pour prononcer un seul mot qui le paralysa. Sheepy. Ce surnom, c'était à l'école primaire qu'on lui avait donné quand certains avaient fait le parallèle avec son prénom et le dessin animé " Shaun le mouton ". Et celle qui avait lancé cette mode était...
- Autumn, souffla-t-il en écho à la déclaration de la jeune fille.
Il n'écouta que d'une oreille la suite de ses paroles. Son esprit était aussi figé que son corps. Il ne comprenait pas. C'était bien son amie d'enfance, il en était sûr maintenant, mais elle n'était plus la même. Son regard se posa sans qu'il ne puisse le contrôler sur ses jambes et le fauteuil. Comment... Il ne posa cependant aucune question, se contentant d'acquiescer à sa demande et d'aller attraper le pot de confiture demandé.
Ses gestes étaient mécaniques, commandés par son cerveau, mais son esprit n'était plus vraiment là. Il posa délicatement l'objet sur les genoux de la jeune fille avant de remettre ses mains dans ses poches dans un geste toujours mécanique. Il évita son regard et encore plus de regarder encore une fois ses jambes. Il ne voulait pas accepter la réalité.
Il se rappelait de leurs courses poursuites, de leurs rires, de leur amitié, de tous ces souvenirs qui envahissaient maintenant sa tête alors qu'il n'y avait plus pensé depuis longtemps. Ils avaient passé tant de bons moments. Et puis, le destin avait été plus fort que leur amitié et les avait séparés. Il ne l'avait plus revue depuis. Et maintenant qu'il la retrouvait enfin, c'était pour s'apercevoir de la cruauté de ce monde. Une question lui brûlait les lèvres, mais il ne la posa pas. Il ne voulait pas savoir ou plutôt il était terrifié à l'idée de savoir. Ils avaient changé. C'était inévitable après tant d'années, mais Shawn aurait préféré que ce soit d'une manière différente. Il ne regrettait pas ce qu'il était ou plutôt il refusait de l'admettre, mais Autumn. Elle était son rayon de soleil à l'époque et elle l'était probablement toujours dans son cœur. Elle ne méritait pas ça. Personne ne méritait ça, mais elle encore moins.
Il releva la tête quand elle reprit la parole et osa enfin la regarder. Son cœur se serra douloureusement devant son visage assombri, sans se douter une seule seconde que c'était de sa faute à lui. Une ombre de sourire plus amer qu'autre chose apparut sur ses lèvres et il ajusta machinalement son capuchon sur sa tête pour se donner une contenance qu'il n'avait probablement plus.
- Le destin aime bien jouer avec nous, faut croire.
Il n'arriva pas à lui rendre son sourire, détournant à nouveau les yeux pour regarder les rayons à la recherche de son chocolat. Même si en vérité, il refusait d'accepter la cruelle réalité. Il attrapa finalement le Saint Graal et l'ajouta à son panier, tenté de faire son rebelle pour une fois et d'en arracher un morceau avant même de passer à la caisse. Ce n'était pas des fruits rouges, mais il était sucré et lui permettrait sans doute de se calmer. Néanmoins, il n'en fit rien et se retourna plutôt vers elle.
- Tu as besoin de quelque chose d'autre ?
Il n'insinuait pas qu'elle avait besoin d'aide. Ce n'était pas son genre de prendre qui que ce soit en pitié. Il n'avait jamais été comme ça. Et surtout pas avec elle. Son amie d'un temps lointain réussirait probablement à saisir la nuance. Il lui demandait simplement si elle allait besoin d'autre chose avant de partir.
- Si c'est pas le cas, tu peux me suivre, j'ai encore quelques trucs à acheter.
Il aurait pu fuir sans se retourner. Il était lâche après tout depuis la mort de ses parents. C'était trop dur d'imaginer ce qu'elle avait vécu, ce qui lui était arrivé. Cela réveillait de mauvais souvenirs de la mort de ses parents. Il aurait dû la fuir juste pour cette raison. Mais il ne le pouvait pas. Il n'avait jamais été capable de l'éviter. Elle l'attirait comme un aimant, aujourd'hui comme pendant leur enfance.
Autumn Wright
Date d'inscription : 14/07/2017 Messages : 27 Dollars : 49 Crédits : kk sur ton doigt
Au plus elle le regardait, au plus elle trouvait qu'il avait changé. Mais en même temps, au plus elle le regardait, au plus elle se rappelait de l'enfant qu'il avait été. Elle était partagée entre un sentiment de confort et d'incertitude. Elle ne savait plus trop si il était son ami ou si il était devenu un inconnu. Elle ne savait plus trop si elle le connaissait vraiment ou si leurs souvenirs n'étaient effectivement plus rien que des souvenirs.
Il avait au moins la décence de ne pas la prendre en pitié. Elle avait traqué au fond de ses yeux une quelconque lueur pathétique qui la ferait fuir, elle avait cherché à travers ses mots quelque chose de désolé ou de vaguement irritant. Mais rien, aucun sens caché, pas de fioritures inutiles. Elle aurait presque été soulagée qu'il ne la plaigne pas. C'était au moins un bon point.
Elle haussa les épaules à sa question, et le suivit, le pot de confiture sur les genoux et une main dirigeant son fauteuil. Le suivre au travers des rayons du supermarché lui rappelait tristement cette époque où elle aimait faire les courses avec son père, qu'elle ne savait jamais trop où ils allaient, mais qu'elle le suivait là où il marchait.
« J'imagine que c'est idiot de demander ce que tu es devenu.. »
Elle trouvait ça bateau, parce que c'était ce que disaient des inconnus qui avaient eu jadis des souvenirs vaguement communs. Elle n'avait aucune envie d'entretenir ce genre de conversations gênantes avec lui comme elle l'aurait fait avec n'importe qui d'autre. D'ailleurs, s'il avait été n'importe qui d'autre, elle n'aurait pas voulu de conversation tout court.
« Tu ne m'as jamais envoyé de message. » Elle marqua une pause et un rire imperceptible lui échappa. « Je ne l'ai jamais fait non plus ceci dit. »
Elle haussa les épaules, car elle estimait que ça n'avait que peu d'importance. Elle n'aimait pas ressasser le passé – ça lui était toujours douloureux. Les regrets, c'était bon pour ceux qui regardaient en arrière et qui trébuchaient en avant. Autumn avait décidé d'avancer en avant et d'ignorer ses arrières, surtout depuis que ses arrières ressemblaient au cimetière de ses jours heureux.
« Est-ce que t'es devenu un héros, toi aussi? »
Elle lui sourit, d'un sourire maigre mais sincère. Une pensée s'échoua pour Denis, qui, lui, s'était donné ce droit, cette ambition, alors qu'on lui avait arraché ce privilège, à elle. Un héros en fauteuil roulant. Elle aurait aimé pouvoir être quelqu'un de bien, elle aussi.
« J'espère au moins que tu te fais appeler Sheepy. Me dis pas que t'es un super-vilain j'y croirais pas. »
Shawn trouvait que Autumn avait changée, mais c'était sans doute normal. Beaucoup de temps s'était écoulé depuis les temps insouciant de leur enfance. Personne ne pouvait rester immuable en grandissant. Ce serait triste dans un sens si c'était le cas. Les gens changeaient, évoluaient, dans le sens positif comme le négatif. Et personne ne pouvait dire quel sens avait pris leur vie.
Qui étaient-ils pour juger le destin, après tout ? Bien sûr, le jeune homme était triste pour son amie. Perdre ses jambes devait être horrible, même s'il ne connaissait pas les circonstances du drame qui en était forcément un. Mais il ne pouvait rien y faire et la prendre en pitié n'y changerait rien. Cela ne lui rendrait pas ses jambes. Tout comme la pitié des gens envers lui ne lui rendrait pas ses parents décédés.
C'était bien parce qu'il souffrait de la compassion mielleuse et souvent peu sincère des autres qu'il veillait à ne pas en faire de même avec elle. Il était bien placé pour savoir que cela faisait parfois plus mal que le drame en lui-même. Les gens souffraient autant qu'ils changeaient, c'était immuable. Gravé dans la roche et les astres. Un sourire amer se dessina sur ses lèvres alors que son visage était tourné vers les boîtes de conserve comme si elles étaient passionnantes.
Lui aussi était différent. Une journée tranquille et sereine qui s'était transformée en drame à cause de l'accident responsable de la mort de ses parents en était la cause. Il ne serait plus jamais le même, pour le meilleur comme pour le pire. Peut-être plus le pire, d'ailleurs.
Elle devait s'en rendre compte, qu'il n'était plus le même. Comme lui s'en rendait compte. Mais que pouvaient-ils faire ? Rien ou du moins pas grand-chose. S'être retrouvé aujourd'hui par le plus grand des hasards - le destin n'avait sans doute rien à voir là-dedans - ne changerait probablement rien à leurs vies. Même si Shawn était content, bien sûr, au fond de lui. Elle lui avait été si précieuse.
Et elle l'était sans doute encore aujourd'hui. Mais une part de lui avait peur de lui montrer ses différences, qu'elle ne l'aime plus à cause de ça. D'avoir honte. C'était peut-être pour ça qu'il n'arrivait pas à la regarder, à affronter son regard. Il avait si peur des conséquences. D'admettre qu'un probable putain d'accident lui avait arraché ses jambes comme on lui avait arraché ses parents à lui.
Alors qu'ils traversaient les allées, elle reprit la parole et Shawn esquissa un sourire amer. Inutile en effet. Son présent n'était pas vraiment glorieux de son avis. Certes, il travaillait pour devenir un super héros plus tard, chose qui était louable aux yeux de beaucoup le monde, mais pour lui ce n'était pas grand-chose. Il ne le faisait même pas par conviction, par envie de rendre le monde meilleur ou je ne sais quelle autre foutaise d'idéaliste.
Non, il le faisait car ça payait bien et parce que ses parents auraient voulu qu'il le fasse. Tout comme la société le voulait aujourd'hui. Et peut-être aussi pour faire semblant d'être toujours le gamin rêveur et passionné d'autrefois. Vaste blague. Il n'était définitivement plus cet autre lui. Mais il héritait toujours de son nom et de ce qu'il signifiait aux yeux du monde. Ou du moins d'Astrophel.
- Idiot en effet...
Il n'ajouta rien, se contentant de sourire avec un peu d'amertume, mais aussi avec un peu d'un sarcasme pas vraiment méchant. Il lui jeta un regard aussi amusé que possible vu sa tension actuelle avant de détourner à nouveau les yeux. Non, rien à faire, il n'arrivait vraiment pas à la regarder plus de quelques secondes. Et sa phrase suivante n'arrangea rien. Shawn se figea et son poing se serra douloureusement dans sa poche alors que son regard s'assombrissait. Non, en effet, il n'avait jamais envoyé de message ou de lettre. Parce que le gamin de l'époque lui en avait voulu un peu de disparaître, qu'il n'avait pas osé une fois qu'il s'était rendu compte de sa stupidité de peur qu'elle soit fâché et que son nouveau lui avait été trop lâche pour oser renouer les liens du passé.
- Je suis désolé.
Ces quelques mots furent soufflés si bas qu'il douta ensuite qu'elle ait pu les entendre. Il n'avait pas pour habitude de s'excuser. Ce n'était pas son genre ou du moins cela ne l'était plus. Plus d'une de ses connaissances actuelles l'auraient regardé avec de grands yeux en l'entendant faire cette chose pourtant si simple pour le commun des mortels. Il n'en avait pas l'habitude, mais il savait que c'était la chose normale à faire. Ça et retenir la phrase agressive qui menaçait de sortir par réflexe de défense. " C'est vrai, tu n'as donc rien à me reprocher, ce serait hypocrite, tu ne crois pas ? " Quelque chose du genre qu'il aurait forcément regretté car au fond il ne le pensait pas.
Un sourire à moitié amusé et amer se dessina à nouveau sur ses lèvres et cette fois il tourna la tête vers elle un peu plus longtemps alors que sa main agrippait un paquet de pâtes. Il haussa un sourcil à la fin de sa phrase, vaguement amusé et vexé. Décidément, elle réveillait des sentiments qu'il croyait éteints chez lui depuis longtemps.
- Tu plaisantes, j'espère ? Mon nom est un peu plus classe que ça. Même si ce n'est pas moi qui l'ai trouvé, enfin passons. Je suis à l'Académie, donc non je ne suis pas vraiment encore un super héros, même si je suppose que c'est en bonne voie. Eternal Ice, c'est comme ça qu'on m'appelle. Et avant que tu protestes, tu devrais savoir que ce surnom t'es entièrement réservé, princesse.
Il lui adressa un sourire quelque peu goguenard avant de ranger son paquet de pâtes dans son panier. Il vérifia sa liste et décida qu'il avait acheté le plus important. Même s'il n'était plus aussi pressé de quitter Autumn, il n'avait pas vraiment envie de traîner dans le supermarché éternellement. Le faux elfe se tourna donc vers elle pour lui demander si elle voulait bien aller boire quelque chose en sa compagnie quand il aperçut du coin de l'œil des boîtes quelconques instables commencer à s'effondrer. Et Autumn se trouvait en plein milieu de leur chute...
- Attention !
Il eut juste le temps de penser que cela faisait longtemps qu'il n'avait pas crié que son corps réagissait sans le consulter. Pour que vous compreniez mieux la scène suivante, imaginez un homme arc bouté contre un fauteuil roulant et sa propriétaire pour protéger cette dernière de la chute de plusieurs boîtes de céréales particulièrement lourdes. Un grognement s'échappa de ses lèvres sous la douleur provoquée par le choc contre sa tête et son dos, mais il se concentra pour regarder son amie et s'assurer qu'elle allait bien.
- Tu n'as rien ?
Son corps n'était probablement pas d'accord avec ses priorités et il se retrouva assis par terre, quelque peu choqué par la rapidité avec laquelle l'accident venait de se dérouler, mais aussi par la douleur et le choc tout court. C'était de simples boîtes de céréales, mais bon sang qu'est-ce que ça faisait mal !
Autumn Wright
Date d'inscription : 14/07/2017 Messages : 27 Dollars : 49 Crédits : kk sur ton doigt
Autumn avait souri, et un rire doux et presque silencieux s'était échappé de ses lippes. Elle avait laissé son regard voyager sur la silhouette de son ami, décidément trop fier pour se faire appeler Sheepy par qui que ce soit – c'était un honneur qui lui était visiblement réservé, et cette pensée la toucha plus que ça n'aurait du. Elle l'avait suivi à travers les rayons et s'arrêta lorsqu'il se retourna sur elle et lorsqu'il débuta l'esquisse de ce qui s'apparentait à une demande, il se précipita sur elle.
Tout alla trop vite. Elle n'eut le temps de rien voir venir que déjà elle se retrouvait déséquilibrée et baissa la tête, par réflexe de sécurité. Elle accrocha ses mains sur les freins des roues de son fauteuil roulant et grimaça en retrouvant une forme de stabilité. Elle releva doucement la tête, le regard figé sur la silhouette de son ami qui venait d'encaisser tout à sa place, et une forme d'amertume s'installa alors dans l'esprit de Autumn.
Pourquoi l'avait-il protégée ? Inspirait-elle tant de faiblesse ? L'aurait-il fait, si elle n'avait pas été assise dans un fauteuil ? Elle se mordit l'intérieur de la joue, incapable de lui en vouloir pourtant. C'était vrai ; il venait de lui sauver la mise.
« Merci... »
Le mot sembla lui avoir écorché l'ego assez pour qu'elle baisse la tête à nouveau. Elle préférait être énervée que redevable. Elle préférait être du côté de celle qui a des choses à reprocher. Là, elle se sentait vulnérable. Elle papillonna des yeux lorsqu'il lui demanda si tout allait bien et se pencha vers lui, ses doigts effleurant la peau de sa joue et relevant son visage. Le geste avait été si délicat qu'il semblait ne pas venir d'elle.
« C'est moi qui devrais te poser la question.. »
Quoique lui demander s'il n'avait rien relevait de l'euphémisme. Elle s'inquiétait véritablement de son état, surtout sachant qu'elle en était, quelque part, un peu responsable. Elle ne lui avait pas demandé de lui servir de bouclier – mais il l'avait fait pour elle malgré tout.
Elle rompit le contact entre ses doigts et son visage et se rassit dans le fond de son siège, le regard accusateur vers l'employé qui se dirigeait vers eux. Elle devenait amère – agressive.
« Bravo l'assortiment des rayons ! On a jamais vu une pyramide de boîtes aussi faciles à empiler aussi mal faite que celle-là ! Si vous vouliez mettre le produit en avant, l'idée aurait été que ça ne tombe pas carrément sur le client! »
Elle haussa les sourcils et l'employé se fit petit, s'excusant mille fois au nom de celui qui en était le responsable. Le pauvre ne savait plus où se mettre, devant le caractère ardent et foncièrement impulsif de Autumn qui n'avait pas pu s'empêcher de s'emporter. C'était plus fort qu'elle, il fallait qu'elle extériorise tout immédiatement.
L'employé s'était mille fois excusé, ainsi Autumn fut en mesure de lui adresser une forme d'abandon. Il avait emporté les boîtes au sol et était reparti plus loin, le dos courbé. Autumn serra le frein de sa roue et tendit une main à Shawn, espérant l'aider à se relever.
« Tu crois que j'aurais du négocier un dédommagement comme la gratuité de tes courses d'aujourd'hui? »
Un sourire se dessina sur son faciès. Elle en aurait été parfaitement capable, et elle sait qu'elle y aurait gagné, à ce jeu-là. Autumn était beaucoup plus dangereuse de ses mots qu'elle ne le faisait paraître.
Shawn ne savait pas vraiment ce qui lui avait pris. Un réflexe sans doute. C'était comme si son corps avait bougé tout seul, peut-être avant même qu'il réalise lui-même ce qui se passait. Il savait bien pourtant qu'Autumn n'était pas du genre à laisser les garçons lui venir en aide. Elle aussi avait sa fierté, l'avait toujours eu. Elle n'avait jamais été une fragile princesse, même si on pouvait s'y tromper de l'extérieur. Mais lui la connaissait suffisamment pour savoir la vérité. Et se douter que cela devait être encore plus vrai maintenant qu'elle était... Il ne dirait pas le mot, il ne le pouvait pas. Il devinait juste qu'elle était trop fière pour accepter la charité accordée habituellement à cette partie de la société dont elle faisait hélas désormais partie.
Il y avait tant de questions à ce sujet qui se bousculaient dans sa tête, devant ses lèvres, sans jamais les franchir pour autant. En tout cas, il espérait qu'elle avait deviné qu'il ne la prenait pas pour une princesse Disney incapable de se débrouiller seule en la sauvant ainsi de cette avalanche de boîtes de conserve. Non, s'il l'avait fait, en dehors du pur réflexe qui avait saisi son corps, c'était avant tout parce qu'elle lui était chère. Il en aurait fait sans doute pareil avec sa sœur malgré ses jambes valides. Les filles ou même les personnes qui pouvaient se vanter de le voir en chevalier servant étaient bien rares alors elles avaient intérêt à apprécier.
Mais un simple regard indéchiffrable comme toujours à son amie pour s'assurer qu'elle était indemne lui fit savoir que ce n'était sans doute pas le cas. Ses lèvres étaient serrées et son regard trop amer pour l'y tromper, observateur comme il était. Néanmoins, il n'allait pas s'excuser, il fallait croire qu'elle ne le connaissait pas aussi bien que ça, ou qu'elle ne le connaissait plus aussi bien pour croire qu'il pouvait la prendre en pitié. Il se contenta donc de se laisser tomber par terre pour ne pas la gêner davantage, de hausser légèrement les épaules avec nonchalance à son remerciement et d'épousseter ses vêtements pour la forme. Avant de jeter un coup d'œil au carnage de boîtes de céréales répandues sur le sol. Heureusement qu'elles ne s'étaient pas ouvertes, il n'aurait plus manqué qu'il se retrouve avec leur contenu plein les cheveux et leurs vêtements.
Il cligna des paupières, pris au dépourvu quand un doigt effleura sa joue et son regard azur rencontra celui de son amie d'enfance. Elle était plus grande que lui maintenant qu'il était par terre, de manière fort peu élégante il fallait l'avouer. Il esquissa un sourire en coin malgré lui à sa phrase et haussa à nouveau les épaules. Il avait un peu mal là où les boîtes l'avaient frappé c'était vrai, mais rien de bien méchant. Il s'en remettrait, le principal c'était qu'elle n'avait rien, leur fierté à tous les deux était moins importante que ça à ses yeux, même s'il ne l'avouerait jamais à voix haute.
- C'est rien. Je m'en remettrai. Juste quelques contusions sans doute.
Non, il n'irait pas chez le médecin, sans doute pas. Et il ne mettrait pas sa jumelle au courant, ne voulant pas se retrouver traîner de force au cabinet, ou pire à l'hôpital. Elle était étrangement surprotectrice quand elle s'y mettait. Ce n'était que des boîtes en carton, après tout. Rendues lourdes par leur contenu et la propulsion de la chute certes, mais que du carton malgré tout. Cela aurait pu être pire avec du métal, mais cela n'avait heureusement pas été le cas.
Il ne fit aucun commentaire quand le doigt se retira de sa joue, ne voulant pas la gêner davantage. Et puis, il ne savait pas vraiment quoi dire, aussi. Heureusement, l'arrivée d'un employé qui rappliquait lui donna la distraction nécessaire puisque qu'Autumn reporta sa colère - et sa frustration, son inquiétude peut-être ? -sur lui.
Shawn esquissa un sourire amusé et assista à la scène sans intervenir, laissant son amie se défouler et savourant le fait de ne pas être à la place de sa victime. Il espérait ne jamais y être, d'ailleurs. Le pauvre bougre le supplia à un moment du regard, mais le blond regarda ailleurs toujours sans intervenir. Son intervention ne ferait que l'énerver davantage, il le sentait et il était assez égoïste pour la laisser se défouler sur les autres plutôt que sur lui. Heureusement, elle finit par s'arrêter et le blond suivit le gars du regard, le prenant quelque peu en pitié finalement.
- Et bien, tu ne fais pas les choses à moitié.
Il n'y avait aucun sermon sérieux dans sa voix cependant. Il était trop amusé pour cela et il préféra attraper la main qu'elle lui tendait tout en lui répondant, avec un sourire narquois aux lèvres, le naturel revenant toujours au galop chez lui. Le choc était passé, s'il avait existé, ce qui restait encore à prouver vu son naturel à se détacher de tout. Ou du moins, il essayait, ce qui n'était pas toujours facile. Se détacher de certaines personnes par exemple semblait très difficile voir impossible...
- Oh, pas bête. Cela serait utile si j'avais besoin d'argent, mais hélas je crois que ce magasin en a plus besoin que moi. Mais si j'en ai besoin un jour, je te ferais signe.
Il répondit par son sourire par un autre, plus sournois. C'était vrai, il n'avait pas besoin d'argent. Sa famille était riche après tout. Merci les parents. Surtout que les Anderson ne dépensaient pas grand-chose au quotidien comparés à d'autres de leur rang. Et ce magasin de quartier n'était pas le plus reluisant de la ville.
Le blond ignora le regard choqué et indigné de la vieille dame qui faisait les courses non loin de là et qui l'avait sans doute entendu. Il n'avait de comptes à rendre à personne et certainement pas à une inconnue. Ses propos n'étaient pas aussi méchants qu'ils en avaient l'air, après tout il venait faire ses courses ici, ce qu'il n'aurait pas fait s'il trouvait l'endroit vraiment minable. Un peu de bon sens, madame.
- Oui, ne t'inquiète pas. J'ai vécu pire.
Une fois debout, il s'épousseta pour de bon cette fois, réflexe de gosse de riche sans doute et ramassa ses courses avant de se tourner vers son amie. Il ne savait pas ce qui allait se passer maintenant qu'ils avaient tous les deux fini ce qu'ils avaient à faire. Ils venaient de se retrouver et ils allaient se quitter de nouveau, comme ça ? Allait-elle de nouveau disparaître de sa vie ?
Il pourrait l'inviter à boire quelque chose, mais il se doutait qu'elle le prendrait mal. Toujours à cause de cette fierté qu'ils avaient en commun. Mais il y avait sa sœur dans l'appartement et même si les deux s'étaient croisées à l'époque, Autumn n'avait jamais été aussi proche de sa jumelle qu'elle l'avait été de lui. Surtout que ce serait sans doute gênant, pour une raison obscure.
- Tu as quelque chose à faire après ? On peut se promener un peu dans les alentours si non. On a sans doute des choses à se dire.
Ce n'était pas vraiment son genre de se balader, seul ou en compagnie. Mais il n'avait pas envie de la quitter tout de suite, étrangement. Il n'avait jamais été quelqu'un de romantique, de mélancolique, de nostalgique. Du moins c'était ce qu'il avait toujours cru, mais les faits étaient là. Il ne voulait plus la perdre. Un sourire quelque peu amer apparut sur ses lèvres alors qu'il marchait vers les caisses. Il ne se reconnaissait plus vraiment, était-ce à cause d'elle ou de ses démons ?
Autumn Wright
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Citoyens
Sujet: Re: sweet memories •• Shawn Mar 3 Oct 2017 - 11:52
Sweet Memories
Elle lui adressa un vague sourire, constatant avec dépit que sa situation était décidément meilleure que la sienne. Certes, elle et Denis ne manquaient pas véritablement d'argent, mais ils s'appauvrissaient au fil des années et de manière considérable depuis que Autumn avait rejeté l'aide de sa mère. Elle n'avait pas réagi, incapable de définir si elle enviait son aisance ou si elle y était plus ou moins indifférente. Elle le regarda se lever sans sourciller et repris en main les roues de son fauteuil roulant. Elle s'était dirigé vers la caisse en lançant un dernier regard vers l'employé qui rangeait ses boîtes.
Elle avait haussé les épaules, peut-être irritée par l'idée d'aller se balader. Elle n'avait aucune envie de faire des tours dans des parcs impraticables – pour elle en tous cas – ou dans la pollution de la ville. Ce n'était pas vraiment la compagnie de Shawn qui l'aurait dérangée – au contraire – mais plutôt la possibilité d'avoir l'air encore plus handicapée qu'elle ne l'était déjà. Elle n'exprima pourtant pas ses craintes et paya ses courses.
« Oui, on peut »
Elle pencha la tête en arrière, réfléchissant à un endroit pas trop moche et facile d'accès, pas trop loin et assez isolé pour que ça ne l'irrite pas davantage. Mais Autumn ne sortait pas assez pour connaître la ville et ses quartiers, et remarqua bien vite qu'elle ne connaissait le nom que d'un seul parc et c'était bien sûr celui en face de chez elle. Elle se mit à rire, d'un rire doux et discret, pratiquement inaudible.
« Ceci dit, tu comprendras que dans mon état, les balades c'est pas exactement mon passe-temps favori »
Ce n'était pas vraiment l'idée de prendre l'air ou même de s'écorcher les mains sur ses roues – finalement, ça n'avait pas vraiment d'importance. Autumn avait juste un réel problème avec les autres, les gens, la foule, le monde – elle n'aimait pas les côtoyer, pas même les voir. Au plus elle s'isolait, au mieux elle se sentait. Elle avait développé de par sa peur et sa haine une certaine forme d'allergie sociale très prononcée qui l'empêchait même parfois d'aller se chercher à manger.
Elle soupira, décidément désespérée de son propre cas, et se gratta la joue. Quelle image donnait-elle donc ? Elle se sentait tellement ridicule. Elle lui sourit, le regard complice.
« Sauf si tu veux faire le chevalier et me pousser le long des promenades »
Shawn ressentait une envie inexplicable de rendre son amie heureuse. Ce n'était pourtant pas son genre de jouer les chevaliers servants. Du moins, autrement que pour les apparences. Mais cette fois il ne jouait pas la comédie. Il avait réellement envie de faire apparaître des sourires sur le visage d'Autumn. Pas par pitié, mais par... A vrai dire, il ne savait pas trop. Il se rappelait juste son visage lumineux d'autrefois, quand ils étaient encore des gosses insouciants, de ses rires et de ses sourires.
Et le fils Anderson voulait simplement les revoir, les réentendre. Alors qu'ils se dirigeaient vers les caisses, Shawn perçut le dernier regard que son amie adressa au pauvre employé et ne put s'empêcher de sourire avec un certain sarcasme. Il ne fit pourtant aucune remarque, même si c'était fort tentant et se contenta de payer ses courses.
Le haussement d'épaules de son amie ne lui échappa pas non plus, mais il fit comme s'il n'avait rien vu. Ce geste pouvait signifier tellement de choses, ce n'était pas le moment de s'imaginer des choses et il n'avait pas envie de l'interroger. Il en fallait beaucoup plus pour le vexer. Elle n'avait pas l'air emballée par sa proposition, mais ce n'était peut-être pas à cause de sa présence à lui. Il espérait en tout cas. Lui était content de la revoir, même si cela avait été inattendu, même si elle avait changée, même si tout était différent...
Le jeune homme ne put retenir une pointe de soulagement l'envahir quand elle reprit la parole. C'était vicieux, c'était odieux de se réjouir de ne pas être le problème vu les circonstances. Mais il ne pouvait retenir le soulagement de l'envahir. Elle voulait bien de lui, de sa présence ou du moins n'avait pas exprimé le contraire.
Il retint néanmoins son sourire qui aurait de son avis sonné déplacé dans la situation présente et se contenta de la regarder d'un air indéchiffrable. Dieu, comme il aimait son rire. Dieu, comme son cœur se serrait en entendant les mots " son état. " Il s'interdit de regarder ses jambes et se contenta de planter son regard bleu dans le sien.
- Ce fauteuil a des roues il me semble. Tu sais, c'est fait pour rouler.
Son regard malicieux adoucit le sarcasme qu'il n'avait pas pu retenir cette fois, prouvant qu'il ne changeait pas complètement non plus en sa présence. Il haussa les épaules comme pour signifier que son état importait peu, ce qui était vrai, du moins à ses yeux. Autumn serait toujours Autumn. Et ce n'était pas ce fauteuil qui allait l'empêcher de passer du temps avec elle.
S'il le fallait, il serait même capable de la porter en princesse, mais il s'abstint sagement de le dire à haute voix. Il se contenta d'avancer après avoir remercié la vendeuse et avoir récupéré ses courses. Heureusement, le sac n'était pas trop gênant à porter. Il se retint de proposer de porter celui de son amie, ayant bien compris qu'elle était trop fière pour ça.
Il ne tenait pas spécialement à passer pour un macho qui estimait que les filles étaient incapables de se débrouiller seules. C'était loin d'être le cas et il ne voulait pas prendre le risque de faire germer des fausses idées dans la tête des gens. Surtout la sienne. Car son opinion comptait sans doute que beaucoup d'autres à ses yeux. C'était étrange, comme il avait toujours eu l'impression d'être fragile à ses côtés. Elle avait toujours été aussi forte et elle l'était toujours. Lui n'était pas sûr de pouvoir tenir bon si on lui enlevait les jambes, mais elle, elle semblait avancer. Mais bien sûr, comme d'habitude, il n'exprima rien de ses pensées à haute voix.
- Hum... C'est tentant. Pourquoi ? Tu ne m'en crois pas capable ?
Il haussa un sourcil quelque peu sarcastique et moqueur, le visage tourné vers elle. Son regard était presque provocateur et incontestablement taquin. Leur complicité en cet instant était parfaitement palpable et Shawn eut l'impression qu'ils étaient hors du temps, hors de l'espace. Dans un monde qui n'appartenait qu'à eux. Son être se réchauffait en sa présence. Comme depuis leur première rencontre.
- Tu m'as manqué, Autumn.
Sa voix cette fois s'était fait presque inaudible, comme un simple souffle et il se détourna pour qu'elle ne voie pas trop son trouble. C'était que lui aussi était très fier. Et c'était tellement rare qu'il exprime ainsi ses véritables sentiments, qu'il ne les dissimulait pas derrière des couches non pas de peinture, mais de mensonges et de comédie. Il n'avait plus l'habitude. Et cela le déstabilisait quelque peu.
Mais aujourd'hui, il n'avait pas envie de mentir. En tout cas pas à elle. Alors il laissa glisser sa main qui attrapa celle encore plus fine de la jeune fille pour la serrer doucement. En espérant qu'elle lui rendrait son geste au lieu de la retirer. Puis, comme une promesse, il passa derrière son fauteuil et commença à la pousser, un sourire légèrement goguenard aux lèvres. Elle ne le croyait pas capable de jouer les gentlemen ? Et bien, il allait lui prouver le contraire.
- Où désirez-vous aller, princesse ?
Si le surnom sonnait affectueux et taquin, Shawn était également très sérieux. Ah, si ses proches le voyaient ainsi, nul doute qu'ils seraient forts surpris. Mais dommage pour eux, le blond ne se comportait ainsi qu'avec son amie d'enfance et peut-être sa sœur quand elle le méritait. En tout cas, il défiait quiconque de prendre en pitié Autumn ou de la regarder de haut en sa présence. Elle était beaucoup plus forte que n'importe qui et méritait beaucoup plus de respect à ses yeux. Mais encore une fois, il ne dit rien à voix haute, se contentant de sourire à lui-même.
Autumn Wright
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Quelques sourires tendres s'étaient déclarés au bord de ses lèvres lasses. Autumn, le corps avachi, avait avancé sans conviction jusqu'aux caisses où ils finirent leurs courses respectives. Elle avait écouté – bu – ses paroles en les ponctuant parfois de rires et de souffles, de regards inhabituellement plein de lumière et dévorés par les étoiles de leur ciel. Des milliers de mots s'étaient débattus au bout de ses lèvres ; elle aurait aimé lui exprimer la joie qu'elle avait de le revoir ; elle aurait aimé lui dire un tas de choses douces ; un tas de phrases pleines de chaleurs ; mais Autumn était froide et son cœur gelé n'avait pas encore décidé de fondre – ses frayeurs sociales hantaient son esprit encore plus profondément chaque jour, et la confession lui était impossible, les tendresses lui étaient interdites.
« Tu m'as manqué, Autumn. »
Et tout à coup, elle se figea, stupéfaite. Ses joues s'empourprèrent en une seconde, et elle baissa les yeux, prise au piège. Mais les mots ne sortaient pas et elle balbutia quelques inepties, quelques syllabes hésitantes qu'il n'avait même pas du entendre. Puis il se retourna, lui aussi, et elle crut avoir rêvé les paroles qu'il avait prononcées. L'avait-il vraiment dit ?
Un sourire s'invita timidement sur son faciès, et son corps s'apaisa. Elle n'ajouta rien de plus et fit tomber un bref silence durant lequel elle dut reprendre son souffle – elle était presque sûre d'avoir mal entendu, mais ça avait suffit à la perturber suffisamment. Quelque part, elle eut envie de le remercier de s'être retourné, car elle ne savait pas comment elle aurait fait s'il s'attendait à un réponse.
Puis sa main glisse vers la sienne, et son regard se relève vers celui de son ami. Est-ce qu'ils étaient amis, d'ailleurs ? Autumn ne se déroba pas à son emprise, et la confirma d'une pression sur ses doigts. Quelques secondes à peine, elle crut que ses douleurs s'étaient échappées ; quelques secondes qui lui parurent durer une éternité, elle avait l'impression de pouvoir marcher de nouveau, si Shawn la soutenait.
Alors un rire se dessina au creux de ses joues et elle se prit à son jeu.
« Direction le parc! »
Et ainsi ils se dirigèrent vers le parc, et Autumn se sentit redevenir timide. Depuis son accident, le contact avec les autres avait toujours été difficile. Mais là, il ne s'agissait pas de ça ; il ne s'agissait pas de malaise, mais simplement d'émotions – incontrôlées et incontrôlables qui se débattaient au fond de sa poitrine meurtrie.
« Hé, Shawn. »
Elle l'avait interpellé différemment, d'une voix plus posée et grave, mais tout aussi douce que précédemment ; comme si ce qu'elle s'apprêtait à dire était plus important que le reste. Au final, Autumn n'avait aucune idée de ce qu'elle voulait lui dire. Les mots lui échappaient.
« Tu crois que cette ville sera débarrassée de.. tout ça, un jour? »
Elle eut un sourire triste en pensant à Denis qui se battait pour la rendre meilleure, et quelques pensées amères au funeste destin qui avait coûté la vie de plus d'un.
« Tu crois qu'on vivra assez longtemps pour voir ce système aboli? »
Pour la première fois depuis la mort de son père, Autumn parlait d'espoir.
Cela faisait longtemps que Shawn n'avait pas été aussi détendu. En ce moment-même, il était loin de son quotidien hypocrite, de ses mensonges, de ses illusions forcées. Juste profiter du moment, discuter du bon vieux temps, se retrouver, profiter de celle qu'il avait tant compté autrefois. Et qui comptait encore aujourd'hui, apparemment.
Le regard turquoise était rempli de nostalgie, de souvenirs, de tendresse et d'amusement. Tout comme son sourire qui s'étira légèrement en la voyant sous le coup de sa déclaration d'amitié. Malgré l'envie forte de la taquiner - les habitudes avaient la vie dure - il se retint, ayant assez de tact pour faire comme si de rien n'était.
Il eut même la délicatesse de regarder ailleurs, silencieux, attendant simplement que la demoiselle se reprenne. Il n'y avait pas besoin de rajouter quoique ce soit ni même d'attendre une réponse. Leur lien était beaucoup plus fort que ça. Et dans un sens il était même soulagé que cela suffise, que cela veuille déjà tout dire parce qu'il n'était pas vraiment du genre sentimental.
Et c'était gênant les mots d'amour alors tant mieux s'il n'avait pas besoin de les répéter ou d'en rajouter une couche. Son sourire, sa main qu'elle avait serré et son rire voulaient tellement tout dire.
- A vos ordres mademoiselle, s'amusa Shawn avec un sourire taquin en feignant une révérence.
Il poussa alors doucement le fauteuil en direction du parc non loin et en veillant à ne pas trop secouer sa passagère. Il ne faisait pas beaucoup attention aux gens, sincèrement en tout cas, en général, mais elle c'était tellement spécial. Même s'il ne l'avouerait jamais à quelqu'un d'autre forcément.
Ce lien, cette amitié, ces souvenirs qui n'appartenaient qu'à eux, c'était leur jardin secret et il y tenait bien plus qu'il n'aurait pu le montrer.
La voix de son amie le ramena dans la réalité et il baissa les yeux sur elle en ne manquant pas de remarquer la différence soudaine de son ton. Néanmoins, son visage resta parfaitement impassible, du moins en apparence. Avec un peu d'attention, vous pourriez néanmoins voir l'étincelle inquiète qui traversa ses yeux l'espace d'une seconde, prouvant qu'il accordait plus d'importance qu'on ne pourrait le croire aux états d'âme de son amie.
- Oui, Autumn ?
Sa voix aussi était parfaitement lisse, parfaitement neutre, parfaitement illisible aux yeux d'autrui. Mais ses mains se crispèrent quelque peu en entendant la suite, prouvant qu'il ne s'en fichait pas tant que ça. Son visage et ses yeux s'assombrirent eux aussi et un soupir las sortit de ses lèvres.
Tout ça.
Oh, il pouvait tellement imaginer ce qu'elle entendait par là. Il y avait tellement de choses qui se cachait derrière cette simple phrase, il n'avait pas besoin de le lui demander pour le comprendre. En évoquant le système, elle soulignait d'ailleurs elle-même le problème.
Le jeune homme resta silencieux quelques secondes qui devaient paraître interminables aux yeux de celle qui attendait une réponse. Mais il ne voulait pas répondre n'importe quoi, il ne voulait pas laisser son amertume, son hypocrisie et son défaitisme tout gâcher.
Avec elle, il voulait être sincère et en même temps l'épargner, la ménager. Qu'il ne croie plus en rien, qu'il n'ait plus d'espoir, qu'il voit la vie en noir et blanc au lieu de la voir en couleur ne la concernait pas. Oh, il voulait tellement peindre un monde en couleurs, éclatant de lumière et de joie pour elle...
- Je ne sais pas, avoua-t-il d'une voix posée, mesurée, prudente en fixant l'horizon pour éviter de croiser son regard si jamais elle devait se retourner. J'ignore ce que nous réserve l'avenir, Autumn. J'ignore si espérer est suffisant pour faire bouger les choses. J'ignore même si j'ai la force de croire à un monde meilleur...
Le jeune homme marqua une pause remplie d'incertitudes, de silences qui voulaient pourtant tellement dire, d'hésitation et de peur. Mais il finit par resserrer à nouveau sa prise sur les poignées du fauteuil à s'en faire mal et à prendre une profonde inspiration pour reprendre doucement.
- Mais malgré tout je crois que, comme toi, j'ai envie d'y croire au fond de moi. Les choses bougeront forcément car le temps n'est jamais fixe. Je ne peux pas garantir que ce sera en bien ni même en mal, mais... Si nous continuons d'y croire et s'il continue d'y avoir des personnes qui font bouger les choses alors peut-être que, oui, nous serons là pour voir une nouvelle ère se lever.
Ce n'était peut-être pas assez, c'était peut-être au contraire trop, mais c'était sa réponse et le jeune homme se surprit à sourire et à profiter du moment présent. Ils entrèrent alors dans le parc et le fils Anderson approcha le fauteuil d'un banc pour s'y laisser tomber et regarder le parc dans toute sa splendeur.
Sa main vint naturellement prendre de nouveau celle de la jeune fille et il la regarda droit dans les yeux, se permettant de chasser une de ses mèches rebelles de son visage avec un sourire amusé.
- Je ne savais pas que tu aimais radoter dis-moi. Fais attention à ne pas devenir grand-mère trop vite.
Puis son expression redevint grave et il demanda doucement comme s'il avait peur de la briser aussi facilement que sa vie à lui s'était brisée.
- Qu'est-ce qui t'es arrivée au juste depuis notre dernière rencontre ?