Tenshi entra dans la cour où quelques retardataires se traînaient encore. Le professeur d'éducation physique leur lança un regard sévère qui suffit à les faire se dépêcher sans qu'il ait besoin de leur parler.

Cela avait du bon d'avoir une réputation de prof' sévère parfois. Il n'aimait pas tant que ça distribuer des colles et des avertissements ou même menacer de le faire contrairement à ce que beaucoup croyaient, mais souvent les élèves obéissaient avant, ce qui l'arrangeait.

Soit parce qu'ils le connaissaient déjà pour être dans ses cours ou parce que les rumeurs circulaient vite à l'Académie. Ah, il n'aurait jamais cru bénir ces dernières. Certains de ses collègues voudraient certainement connaître son secret pour avoir autant d'autorité sur les gamins, mais il ne pensait pas en avoir un.

Et puis, il ne fallait pas rêver non plus, tous n'étaient pas sensibles à son autorité... Il y aurait toujours des rebelles dans ce monde. La preuve d'ailleurs avec un trio bien connu du professeur pour semer souvent la zizanie dans ses cours qui n'avait pas accéléré le pas malgré son regard insistant et qui continuait de bavarder comme si de rien n'était.

Comme si la première sonnerie n'avait pas sonné et comme si la deuxième n'allait pas le faire bien avant leur entrée en classe. Le jeune professeur fronça les sourcils, clairement conscient qu'ils défiaient volontairement son autorité et, agacé, claqua de la langue avant de les interpeller.

- Vous trois, si vous ne voulez pas écoper d'une retenue pour retard et provocation envers un professeur, je vous conseille de vous dépêcher.

C'était peut-être sévère, mais Tenshi ne supportait guère qu'on se moque de lui et les trois garçons montraient un peu trop souvent qu'ils se fichaient bien de son autorité. Ils n'étaient pas obligés de le respecter lui, mais le japonais ne tolérait pas le manque de respect envers les professeurs en général.

Heureusement, les trois compères ne devaient pas avoir envie d'obtenir une retenue car, après lui avoir jeté un regard noir et échanger quelques mots, ils se dépêchèrent. Le plus censé d'entre eux prit même la peine de s'excuser avant de rejoindre ses potes en marchant vite.

Satisfait, mais las de leur manège Tenshi secoua la tête avant de pénétrer à son tour dans le bâtiment administratif. Il vérifia cependant d'un coup d'œil circulaire que personne d'autre ne traînait dans la cour en professeur attentif.

Une fois la brève inspection terminée, il rejoignit les bureaux en saluant au passage les collègues qu'il croisait. Même s'il n'était pas le prof le plus sociable de l'Académie, il mettait un point d'honneur à faire un effort.

Ce serait agaçant d'être en mauvais terme avec les autres enseignants, surveillants et autres membres du personnel, après tout. Et ça ne serait pas pratique au cas où il aurait besoin d'un service, d'une information ou toute autre chose qui demanderait qu'il leur adresse la parole.

La plaie. Il ne savait pas comment faire pour bien s'entendre avec les gens. Oh, la politesse il l'avait, mais il paraissait toujours froid et distant et ça ne plaisait pas à tout le monde. Pas sa faute s'il ne savait pas comment s'y prendre avec les gens !

Parfois il avait envie de lire des bouquins sur la question, mais se disait toujours qu'il n'en était pas à ce point quand même... Si ? Misère. Poussant un soupir, il pénétra dans le bureau qu'il partageait avec quelques autres collègues.

Apercevant une tête rousse, le japonais hésita un instant avant de décider qu'il avait besoin de se plaindre à quelqu'un et se laissa donc tomber à côté de Hayden Myers, un des surveillants de l'Académie.

Et accessoirement un de ses rares amis. Du moins si quelqu'un comme lui était capable d'en avoir un. Au moins, c'était une des personnes à l'Académie parmi les adultes avec qui il s'entendait le mieux. Et c'était précieux dans le cas de Tenshi, croyez-moi.

- Salut, Myers. Je crois que j'ai besoin d'un café.

Posant son sac par terre, il en sortit son cahier de cours et nota dans la marge les noms des trois garnements de tout à l'heure. Il n'avait fait que les menacer, mais comme ils l'avaient mis de mauvaise humeur dès le matin il les ferait peut-être courir un peu plus que les autres tout à l'heure, l'air de rien...

- J'ai adopté un chat ce week-end.

Il ne savait pas pourquoi il disait ça à son collègue, mais il l'avait dit. Peut-être parce que Myers était un des rares à qui il avait parlé de son intention d'en adopter un. Ou peut-être parce que c'était un de ses amis même s'il avait du mal à le reconnaître.

Ouais, il n'avait pas l'habitude d'avoir des amis et alors ? On n'est pas tous sociables dans ce monde vous savez. Et il se portait très bien comme ça, merci bien. Et il faisait des efforts, qu'est-ce qu'il vous faut de plus ?

C'est bien ce que je pensais, merci.